N°2 / Le Droit pénal face aux défis de la société africaine contemporaine

La constitutionnalisation de la lutte contre la corruption en droit guinéen

Alsény Traoré, Doctorant En Droit Public, Université Toulouse I Capitole, Institut Maurice Hauriou

Résumé

A s’en tenir à la lettre de la Constitution guinéenne de 2010, la volonté de lutter contre la corruption paraît manifeste. S’y ajoute la reconnaissance de l’autorité, à l’égal des lois et sous réserve de réciprocité, de textes internationaux qui condamnent les pratiques consistant en une utilisation malhonnête des deniers publics. Plusieurs lois nationales complètent ce dispositif notamment en combattant le blanchiment de capitaux et en encadrant la passation des marchés publics et les délégations de service public. Pour autant un manque évident de volonté politique et une certaine inertie des tribunaux rendent ces dispositions inopérantes. Plusieurs affaires non sanctionnées en témoignent. Dans le même sens, une obligation comme celle de déclarer les patrimoines est peu et mal appliquée. Autre exemple : la méconnaissance de l’interdiction de financer les partis politiques ou les syndicats avec des fonds publics. L’étude de la Haute cour de justice montre les limites de ses interventions. Finalement, la pluralité des organes consacrés à la lutte contre la délinquance financière en général et contre la corruption en particulier ne permet pas de remporter les succès escomptés. Il s’agit entre autres de la CENTIF (Cellule nationale de traitement des informations financières), l’ORDEF (Office de répression des délits économiques et financiers), de la BCN-Interpol Guinée, de la direction nationale des marchés publics (DNMP) et de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP). S’y ajoutent l’IGE (inspection générale d’Etat) et l’IGF (inspection générale des finances). Leur efficacité est d’autant plus limitée que la justice demeure silencieuse, avec un faible taux de poursuites judiciaires.

Abstract: According to the letter of the Guinean Constitution of 2010, the will to fight corruption seems obvious. Added to this is the recognition of the authority, equal to the law and subject to reciprocity, of international texts which condemn practices consisting in the dishonest use of public funds. Several national laws supplement this system, in particular by combating money laundering and by regulating the award of public contracts and public service delegations. However, an obvious lack of political will and a certain inertia of the courts make these provisions inoperative. Several unsanctioned cases bear witness to this. In the same sense, an obligation such as that of declaring assets is little and badly applied. Another example: ignorance of the ban on financing political parties or unions with public funds. The study of the High Court of Justice shows the limits of its interventions. Finally, the plurality of bodies devoted to the fight against financial crime in general and against corruption in particular does not make it possible to achieve the expected successes.

These include CENTIF (National Financial Information Processing Unit), ORDEF (Office for the Repression of Economic and Financial Crimes), BCN-Interpol Guinea, the National Directorate of Public Procurement (DNMP) and the Public Procurement Regulatory Authority (ARMP). There are also the IGE (General State Inspectorate) and IGF (General Finance Inspectorate). Their effectiveness is all the more limited as the justice system remains silent, with a low rate of prosecution.

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La lutte contre la corruption reste encore un sujet majeur pour tous les Etats, tant les moyens et les méthodes employés pour sa lutte sont multiformes, incohérents et souvent inadaptés à cause notamment de l’absence d’une véritable politique de lutte. Chaque Etat essaye, au gré des révélations et des scandales politico-médiatiques, de réajuster sa législation pour répondre à une demande pressante de son opinion publique. Evidement cette réponse imposée par les différents calendriers internes propres à chaque Etat s’avère inefficace au regard des besoins d’harmonisation (législative et judiciaire) de l’ensemble du dispositif.

Qu’à cela ne tienne : les années 1990 (Dell, 2006, p. 14) constituent bien un marqueur décisif dans la prise de conscience, au niveau des Etats, de la nécessité d’identifier le phénomène, d’en définir les contours avant de mettre en place des politiques visant à enrayer ce « cancer dont il faut délivrer l’humanité[1] ». Cet élan a été suivi d’un long processus d’harmonisation des législations en matière de lutte contre la corruption. Il aura permis non seulement de consacrer sa réprobation internationale (du moins théoriquement) mais aussi son incrimination (très hésitante) dans les législations internes[2]. Et malgré cette reconnaissance désormais assumée de la réalité du phénomène avec quelques mesures (encore timides) déployées çà et là par certains Etats, et au niveau international (la convention des Nations unies contre la corruption du 15 juillet 2005 ; la convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales de 1997 ; la convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption du 16 décembre 2003 ; etc.), la corruption reste tout naturellement omniprésente dans nos sociétés. Les raisons de cet échec varient d’un Etat à un autre.

 En Guinée, particulièrement, parce qu’il s’agit bien d’elle dans cet article, les prémisses de la réprobation de ce phénomène peuvent être situées autemps de la révolution « sékoutouréenne »[3]. Il s’agissait alors d’une relative mise en cause du phénomène. C’est à la fin des années 1990 qu’a effectivement démarré le processus d’incrimination du phénomène en Guinée[4]. A partir de 2010, cette réprobation de la corruption a été prise en compte par le constituant guinéen.

Quoique déjà présente de façon multiforme dans toutes les composantes de la société guinéenne, la pratique de la corruption s’est véritablement généralisée, au point de se banaliser au quotidien au début des années 2000. Il faut, néanmoins, souligner qu’au lendemain de l’échec du « complot Diarra Traoré » de 1985, qui a conduit à la purge de tous les membres civils et militaires de l’entourage de Sékou Touré, il s’était déjà installé un nouveau régime avec un réel sentiment de puissance, d’impunité et de contrôle des richesses du pays. Cependant, la période post référendum de 2001, qui a permis au président Lansana Conté (1984-2008), de faire sauter le verrou constitutionnel de la limitation du nombre de mandats présidentiels, peut être considérée comme un contexte « d’inflammation » ou de « surchauffe » ayant conduit inexorablement à la propagation du phénomène dans le pays.

De nombreux scandales de corruption ou de détournements de deniers publics souvent retentissants, faits nouveaux pour l’opinion, parmi lesquels l’affaire Air Guinée, l’affaire FUTURLEC et l’affaire FRIGUIA, etc. se situent à cette époque de l’histoire politique du pays. De 1985 à 2008, 23 années se sont écoulées avant la promulgation de l’ordonnance du 14 janvier 2009 du CASSSE (comité d’audit du secteur économique et de surveillance des secteurs stratégiques de l’économie) par la junte militaire au pouvoir (Afrimap et Osiwa, 2013, 18). Après seize missions d’audit, le comité a conclu, dans son rapport publié en mars 2010, au détournement de plus de six milliards de francs guinéens (80 millions de dollars américain) dans les entreprises para étatiques et dans des projets publics divers (Afrimap et Osiwa, 2013, 18) sans préciser les périodes couvertes par ce contrôle. Ce montant, déjà très important, paraît d’ailleurs dérisoire par rapport à l’ampleur du phénomène de corruption ces vingt dernières années.

C’est en tirant les leçons de cette réalité et en essayant de faire écho aux demandes pressantes de l’opinion publique pour une moralisation de la vie publique, que le constituant guinéen, au sortir de cette énième transition, s’est résolu à réaffirmer dans la Constitution du 7 mai 2010 certains principes de base de la bonne gouvernance à savoir la transparence dans la gestion du denier public et la séparation des pouvoirs. Il consacre « solennellement [l’opposition fondamentale du peuple] à toute forme inconstitutionnelle de prise du pouvoir, à tout régime fondé sur la dictature, l’injustice, la corruption, le népotisme et le favoritisme »[5]. Avant de souligner plus loin, « la volonté [du peuple] de lutter résolument contre la corruption et les crimes économiques », considérés, dorénavant, comme imprescriptibles[6].

Au-delà de son préambule, le dispositif constitutionnel contient également des mesures ou principes se rapportant à la lutte contre la corruption, comme le droit d’accès des citoyens à l’information publique[7], comme l’obligation de neutralité et de transparence dans la gestion du service public[8], comme l’obligation de déclaration des avoirs du président de la République et des membres du gouvernement[9] ou encore comme la création d’une Cour des comptes[10] qui était jusque-là une chambre des comptes créée au sein de la Cour suprême etc.

La constitutionnalisation de la lutte contre la corruption se présente ici comme une prise en compte directe et effective du phénomène par les rédacteurs et son introduction pour la première fois dans le texte suprême du pays. Ainsi, le constituant affirme expressément que la corruption est un acte illicite et prévoit, par la même occasion, des mécanismes de répression dans le texte constitutionnel.

Ainsi, dix ans après son adoption, suivie de la création d’une Cour constitutionnelle, il est intéressant de se pencher sur la portée de l’interdiction de la corruption dans la Constitution guinéenne du 7 mai 2010 et de mettre en lumière les exigences qu’une telle évolution a pu apporter tout en montrant les limites juridiques et matérielles auxquelles elle a été confrontée.

La réflexion initiée s’attardera particulièrement sur la lutte contre la corruption publique, plus précisément celle des agents publics. Il s’agira ainsi d’apprécier les effets d’une criminalisation constitutionnelle de la corruption dans un but de moralisation de la vie publique.

Cette démarche aidera à cerner les efforts entrepris dans la lutte contre le phénomène depuis 2010. Elle permettra de mesurer la place qui lui a été accordée dans la gouvernance économique, administrative et sociale ces dernières années, ainsi que l’importance des efforts qu’il reste à entreprendre pour rendre effectives les mesures prises en la matière.

Cette posture demande d’élucider les points suivants : la constitutionnalisation de l’incrimination de la corruption a-t-elle favorisé une meilleure prise en compte de la lutte contre le phénomène en Guinée ? La politique anticorruption pratiquée par la Guinée est-elle adaptée ?

Un examen approfondi de la pratique guinéenne en matière de lutte contre la corruption depuis 2010 révèle que l’incrimination constitutionnelle de la corruption est une avancée essentiellement théorique (I) profondément limitée par une faible volonté politique (II).

 

I. L’apport essentiellement théorique de l’incrimination constitutionnelle de la corruption en Guinée

L’une des contributions phares de la Constitution du 7 mai 2010 a été de définir la corruption comme un ensemble de pratiques « obscènes », inacceptables dans la société démocratique souhaitée par le peuple de Guinée[11]. Elle reste aussi celle qui a été la moins mise en valeur au profit d’autres innovations de ladite Constitution comme l’exception d’inconstitutionnalité, la création de l’INIDH (Institution nationale indépendante des droits de l’homme), ou encore de la Cour constitutionnelle. Cette faible mise en lumière est assez caractéristique de l’intérêt accordé à la lutte contre le phénomène ces dix dernières années.

Si la Constitution du 7 mai 2010 a été suivie par un processus lent d’élaboration de normes juridiques infra-constitutionnelles (A) de lutte contre la corruption, elle n’a pas connu un véritable succès dans l’organisation des moyens institutionnels de sauvegarde des intérêts financiers de l’Etat et des droits du citoyen (B).

 

A. Une constitutionnalisation accompagnée d’un élan législatif

Pour donner suite à la dénonciation de la corruption par le constituant, les nouvelles autorités issues des élections de 2010 se sont lancées dans une opération de production de normes anticorruption pour transposer en droit interne (2) les engagements internationaux de la Guinée (1).

 

1. La ratification des traités internationaux

Le traité, devenu l’instrument privilégié des relations internationales (Dupuy et Kerbraty, 2014, 295), est « l’expression de volontés concordantes, émanant de sujets de droit dotés de la capacité requise, en vue de produire des effets juridiques régis par le droit international »[12]. Les modalités de son opposabilité à l’Etat sont fixées cumulativement par des règles internationales et des règles nationales (Santulli, 2013, 67 et s. ; Combacau, 1991, 38-40).

La ratification dont il s’agit ici peut être définie comme « l’acte par lequel l’Etat exprime son consentement à être lié par le traité. Celui-ci peut être manifestée de toute autre manière, pour autant que les parties en soient ainsi convenues »[13]. Il s’agit par conséquent d’un acte discrétionnaire (Verhoeven, 2000, 385) dont la prise fait de l’Etat une partie au traité (Combacau, 1991, 38). En droit guinéen, ce sont les dispositions de la Constitution du 7 mai 2010 en ses articles 149 à 151 qui définissent les modalités de ratification des engagements internationaux.

Pour matérialiser son engagement à lutter résolument contre la corruption comme exprimée dans la Constitution de mai 2010, la Guinée s’est décidée enfin à adopter des actes concrets. Au nombre des textes internationaux qu’elle a signés, il y a la convention des nations contre la corruption du 15 juillet 2005 et celle de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption du 16 décembre 2003. Pour les besoins de ratification, le pays a engagé une procédure unique pour les deux textes le 29 janvier 2013[14].

Ainsi, la Guinée intègre ces deux textes phares du droit international dans son ordonnancement juridique en matière de lutte contre la corruption. En effet, conformément à l’article 151 de la Constitution du 7 mai 2010 « les traités ou accords régulièrement approuvés ou ratifiés ont, dès lors leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve de réciprocité ». En ratifiant les traités onusiens et africains anticorruption, la Guinée favorise leur invocabilité dans son ordre juridique interne. Si la convention onusienne est considérée comme le texte international le plus complet dans ce domaine (Delle, 2006, 28-29), celle de l’Union africaine (UA) est l’un des rares instruments juridiques internationaux qui établit le lien entre corruption et droits de l’homme[15]. Cet élan de ratification, donc de renforcement de l’arsenal interne de lutte contre la corruption, constitue sur le plan théorique, une expression de la volonté de l’Etat guinéen non seulement de se conformer à l’esprit et à la lettre du texte constitutionnel, mais aussi de donner une suite favorable aux évolutions enregistrées depuis quelques années au niveau international.

A ces deux textes viennent s’en ajouter d’autres, spécifiques, généraux ou régionaux, auxquels la Guinée est partie comme la convention des Nations unies contre la criminalité transfrontalière organisée du 15 novembre 2000 –ratifiée par la Guinée le 9 novembre 2004– et le protocole de la CEDEAO (Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest) sur la lutte contre la corruption, du 21 décembre 2001. Ces textes restent, dans leur grande majorité, de la soft law dans l’ordre juridique international. Ils laissent pour la plupart assez de marge de manœuvre aux Etats dans la mise en œuvre des mesures dictées.

En conséquence, la seule ratification de ces traités internationaux ne saurait suffire pour atteindre les objectifs assignés par la Constitution de mai 2010. C’est pour cela que le législateur guinéen a, en plus du Code pénal, jugé utile d’adopter une législation anticorruption spéciale.

 

2. L’harmonisation de la législation nationale

Pour assurer l’effectivité de la norme internationale en droit interne, on ne saurait se limiter, pour certains Etats, au seul formalisme de ratification qui se borne en général à admettre l’opposabilité de l’instrument ratifié à l’Etat et à ses justiciables. Sur le plan international il en résultera, pour l’Etat défaillant, un manquement à ses engagements internationaux. Dans cette hypothèse, la logique dualiste (Kamara, 2011, 103) voudrait que deux procédés de ratification soient retenus pour rassurer les Etats et assurer une intégration plus souple et mieux acceptée de la norme internationale dans les ordres juridiques internes (Trielpel, 1923 ; Trielpel, 2010 ; Alland, 2019, 201 ; Combacau et Sur, 2014, 119-120).

Pour ce qui est de la Guinée, le constituant a fait le choix des deux procédés : moniste et dualiste. Malgré la lettre de l’article 151 de sa Constitution du 7 mai 2010, des actes supplémentaires sont adoptés pour donner effet aux engagements internationaux en matière de lutte contre la corruption et infractions assimilées. C’est dans ce sens qu’elle s’est dotée, après ratification d’instruments internationaux relatifs à la lutte contre la corruption, de textes législatifs fixant le cadre de lutte contre la corruption et ses infractions assimilées. C’est le cas de la loi n° L/2006/010/AN relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux en République de Guinée, de la loi n° L/2012/020/CNT du 11 octobre 2012, fixant les règles régissant la passation, le contrôle et la régulation des marchés publics et de délégation des services publics, de la loi n° L/2012/012/CNT portant loi organique relative aux lois de finances et de la loi n° 0041/2017/AN portant prévention, détection et répression de la corruption et des infractions assimilées du 4 juillet 2017.

Ces normes législatives relatives à la prévention et à la lutte contre la corruption et les infractions assimilées sont remarquablement complétées par la loi d’harmonisation et de réglementation de juillet 2017 qui se veut la plus complète en matière de la lutte contre la corruption. Cette loi anti-corruption, qui marque l’aboutissement d’une longue dynamique revendicative de transparence et de bonne gouvernance, a un certain nombre de mérites qu’il convient de préciser. Par exemple, elle a retenu la définition onusienne de l’agent public (articles 2 et 16). Cette dernière a le mérite d’être plus précise et plus complète que la définition retenue par la CEDEAO et l’Union africaine qui ne propose pas de définition de l’agent public dans sa convention. Le traité anticorruption onusien définit, en fait, distinctement l’agent public étranger et le fonctionnaire d’une organisation internationale publique.

Dès lors tout fait de corruption ou infraction assimilée est sanctionné au sein des services de l’éducation (article 37) et de la santé (article 38). Mais aussi en matière d’avantages indus en tout domaine (articles 43 à 53) et d’entrave au bon fonctionnement de la justice (article 57). En plus d’avoir défini le parjure (articles 12 à 15), la loi anti-corruption de 2017 prévoit une participation citoyenne dans la lutte contre la corruption (articles 64, 94 et 96). Elle reprend l’esprit de la Constitution de 2010 et institue l’imprescriptibilité du fait de corruption et des infractions assimilées (article 9), définissant les modalités de déclaration de patrimoine et de conflit d’intérêts ainsi que les autorités nationales assujetties à cette obligation (articles 25 à 30), à savoir le chef de l’Etat, le chef du gouvernement, les membres du gouvernement, les parlementaires, les responsables des régies financières etc.

Ces avancées importantes apportées dans le dispositif juridique dédié à la lutte contre la corruption n’ont pas été suivies de réalisations concrètes. L’analyse des mécanismes établis pour assurer l’effectivité des normes de répression montre une grande disparité entre l’expression de volonté par les textes et la mise en œuvre pratique des règles. Mieux : certaines obligations constitutionnelles de lutte contre la corruption tardent à connaître une véritable garantie juridique.

 

B. Une constitutionnalisation limitée par les réalités politiques

Les normes constitutionnelles qui incriminent la corruption prévoient en même temps les moyens de prévention. Mais ceux-ci demeurent inefficaces car limités pour l’heure à un stade théorique. L’explication de cette lenteur dans la mise en œuvre des normes se trouve à deux niveaux : l’absence de définition des sanctions pour les manquements à certaines obligations constitutionnelles ou légales en matière de lutte contre la corruption (1) et l’inexistence de tribunaux opérationnels pour la répression de ces actes, notamment ceux commis par les hauts responsables (2).

 

1. L’ineffectivité des obligations constitutionnelles

La question de l’effectivité du droit a fait l’objet de réflexions dynamiques au sein de la science juridique (V. Champeil-Desplats et E. Millard, 2013, 65). Elle a permis de mettre en lumière sa difficile conceptualisation ou la difficile détermination de son sens et de sa portée. En effet, la question de la matérialité du droit renvoie, en général, à l’évaluation de sa portée sur les pratiques sociales, c’est-à-dire la définition du degré d’inapplication d’une norme (Lascoumes et Séverin, 1986, 101).

Dans la littérature juridique française ou « francophone », une distinction est établie entre l’effectivité d’une norme et son efficacité (J. Betaille, 2012, 1-3). Pourtant les deux notions impliquent le passage du voulu au réel. Toutefois, « […] chacune renvoie à des modalités d’évaluation différente » (Champeil-Desplats et Millard, 2013, 65). Si l’effectivité s’évalue par les modalités de réception et d’application du droit par les autorités, l’efficacité quant à elle se rattache aux « effets recherchés ou poursuivis par les auteurs de l’énoncé, voire de la norme » (Millard, 2006, 53 ; Champeil-Desplats et Millard, 2013, 65).

Dix ans après l’adoption de la Constitution du 7 mai 2010, il est intéressant de revenir sur l’influence que les conventions internationales ont réellement exercée sur le dispositif guinéen de lutte contre la corruption. En effet, l’essentiel des normes anti-corruption nées des conventions internationales et reprises dans la Constitution de 2010, peut être regroupé en deux catégories : l’imprescriptibilité[16] du crime de corruption et les moyens préventifs mis en place[17]. Ces deux catégories de normes ont été reprises dans la loi anticorruption de juillet 2017[18]. Toutefois lorsque l’ensemble des critères d’effectivité et d’efficacité sont appliqués à ces prescriptions constitutionnelles, plusieurs points de défaillance apparaissent.

Sur le principe général d’incrimination de la corruption, et notamment celle des agents publics : si le texte constitutionnel a été complété par la loi de juillet 2017 et par le nouveau Code pénal, il ressort une application quasi nulle des normes de répression. Celle-ci est essentiellement due à un manque de volonté politique où la dénonciation de l’inertie de la justice face aux scandales de corruption n’est qu’anecdotique, alors que conformément à l’article 64 de la loi anticorruption de juillet 2017, « les dénonciations des cas de corruption faites par la presse sont des révélations crédibles, susceptibles d’être évaluées ou vérifiées de façon à permettre des poursuites judiciaires, sous peine d’engager la responsabilité de l’auteur ». Ainsi, ce manque de répression des actes de corruption, pourtant largement relayés par la presse, limite considérablement, pour l’heure, l’effectivité de la lutte. Depuis 2010 plusieurs affaires ont été révélées et ont connu un large écho à travers la presse sans jamais connaître de suites judiciaires. Il s’agit entre autres de « l’affaire Ibrahima Kourouma » (alors ministre de l’Education nationale), « l’affaire des 13 milliards de FG » au ministère de l’Economie et des Finances, « l’affaire Bolloré », « l’affaire Sable Mining » etc.

Pour ce qui est des mesures préventives prévues dans la Constitution, notamment le droit d’accès à l’information publique et l’obligation de déclaration des avoirs des hauts fonctionnaires, les limites sont beaucoup plus grandes. Elles commencent d’abord par la formulation des dispositions qui sont en réalité des exhortations sans définir des moyens coercitifs ou des sanctions en cas d’inobservation des règles. Par exemple, l’obligation de déclaration des avoirs à l’encontre des hauts fonctionnaires prévue à l’article 36 de la Constitution, reprise dans les articles 25 à 30 de la loi de juillet 2017, n’est aucunement assortie de véritables sanctions à l’encontre de ceux qui s’y soustraient.

Toutefois, selon l’article 30 de ce texte, « le défaut de déclaration de patrimoine en dépit d’une mise en demeure restée infructueuse pendant trois (3) mois est assimilé à l’enrichissement illicite, prévu et puni par les dispositions de l’article 776 du Code pénal ». En fait, cette formulation manque de clarté et de précision. Elle évoque une mise en demeure sans préciser l’autorité compétente pour sanctionner ce manquement. Si une assimilation de ce type de manquements à de l’enrichissement illicite est inévitable selon l’esprit de la loi de juillet 2017, elle demeure toutefois limitée de facto par l’inefficacité du système judiciaire.

Il était possible de passer par le Parlement ou la Cour constitutionnelle pour sanctionner ceux qui enfreignent cette règle de transparence. D’ailleurs, le manque de publicité des rares déclarations faites à cette date –en violation du paragraphe 2 de l’article 36 de la Constitution– prive les citoyens de leur droit à l’information sur la sincérité et la régularité de cette procédure. Ce dispositif prévu pour dissuader les agents publics de se livrer à des actes de corruption est encore à un stade purement théorique.

Toujours dans le cadre de la protection des finances publiques, l’interdiction faite par l’article 19 de la loi anticorruption de juillet 2017 aux agents publics de recourir aux fonds publics pour financer un parti politique ou un syndicat en dehors des prescriptions légales et réglementaires n’a jamais été respectée depuis les évolutions normatives de 2010. Même si toute utilisation injustifiée de l’argent public est assimilée au détournement de deniers publics et punie comme telle, aucune action judicaire n’a été engagée contre des agents publics qui financent les activités du parti au pouvoir. Au contraire ceux qui ne le font pas sont politiquement menacés au sein des organes du parti.

Enfin, le droit des citoyens d’accéder à l’information publique prévu par la Constitution et la loi de juillet 2017 est limité par le manque de moyens techniques et opérationnels pour la réalisation des objectifs fixés par les textes. Et mieux : aucune sanction n’est prévue en cas d’inobservation.

La dynamique enclenchée par le constituant en 2010 s’est donc heurtée à plusieurs obstacles politiques et juridiques voire judicaires. Parmi les plus importants, il y a le retard dans la création d’une juridiction compétente pour juger les personnes couvertes par l’immunité comme le président de la République.

 

2. La Haute cour de justice

En Guinée, le concept de « Haute cour de justice » comme juridiction d’exception est apparu avec l’arrivée du multipartisme au début des années 1990. Si la loi fondamentale du 23 décembre 1990 l’avait prévu[19], contrairement à la Constitution du 10 novembre 1958 et à celle du 14 mai 1982, complétée par une loi organique se rapportant à la Haute cour de justice[20], elle n’a jamais été fonctionnelle. Sa consécration par la nouvelle Constitution du 7 mai 2010 ne pourrait être effective qu’avec l’adoption de la loi organique prévue à l’article 121. Ce qui n’est pas encore le cas.

Il existe une diversité des modalités de composition des « Hautes cours de justice » en Afrique (mixtes, politiques, mixtes équilibrées ou mixtes diffuses) (Dabonez, 2016, 258). En Guinée, au terme de l’article 117 de la Constitution du 7 mai 2010 en ses alinéas 1 et 2, « la Haute cour de justice est composée d’un membre de la Cour suprême, d’un membre de la Cour constitutionnelle, d’un membre de la Cour des comptes et de six députés [… élus par leurs pairs] ». Il y apparaît un certain équilibre entre magistrats et politiques qui composent la juridiction et ce, même si c’est l’un des magistrats qui est appelé à la présider[21]. La Guinée opte ainsi pour une composition mixte diffuse.

En effet, elle a une compétence personnelle limitée au président de la République et aux membres du gouvernement[22]. Et sa compétence matérielle varie en fonction de la qualité des auteurs. Elle juge le président de la République pour haute trahison, et le premier ministre et les membres du gouvernement pour les délits et les crimes[23]. Le problème à ce niveau c’est l’indifférenciation, pour ces derniers, des actes publics et privés. Ce qui donne comme interprétation littérale la soumission à la Haute cour de justice, des actes privés commis par les membres du gouvernement.

Le constituant guinéen (Conseil national de la transition) a procédé à la définition de la Haute trahison. Selon l’article 119 de la Constitution du 7 mai 2010, « Il y a haute trahison lorsque le président de la République a violé son serment, les arrêts de la Cour constitutionnelle, est reconnu auteur, coauteur ou complice de violations graves et caractérisées des droits humains, de cession d’une partie du territoire national, ou d’actes attentatoires au maintien d’un environnement sain, durable et favorable au développement ». Cependant, cette définition laisse entrevoir la problématique soulevée par cette compétence de la Haute cour de justice (Dabonez, 2016, 259-264). Nous sommes là en présence d’une définition qui n’intègre pas expressément certaines infractions comme la corruption parmi les éléments constitutifs du crime de haute trahison. Elle ne pourrait y être établie que de façon implicite en lien avec les droits de l’homme ou les actes portant atteinte au maintien d’un environnement sain, durable et favorable au développement.

Pourtant, « si l’on sait que la corruption est une infraction que les personnes prévues par les différents textes [y compris le président de la République] peuvent commettre et qu’aucun autre organe n’est compétent pour les juger [… il est impérieux que celle-ci soit citée parmi] les organes anti-corruption […] » (Badet, 2016, 41). Cependant, une lecture combinée des articles 122 et 117 de la Constitution permet de soutenir une acceptation des définitions légales d’infractions parmi lesquelles figure la corruption. Mais, comme c’est la matière pénale, il est important d’être explicite et précis dans la détermination de la compétence matérielle de cette juridiction pour éviter que l’invocation du principe de la légalité des délits et des peines ne soit un obstacle aux poursuites pénales des actes de corruption commis par le président de la République.

L’essentiel des obstacles à la poursuite des dirigeants sont à rechercher ailleurs. En effet, la procédure de mise en accusation consacrée à l’article 120 de la Constitution est en fait la garantie d’une impunité totale pour le président de la République. Il découle de cette disposition des conditions quasi-impossibles à réunir dans des régimes présidentiels forts comme c’est le cas en Guinée. En effet, la mise en accusation ne peut non seulement être demandée que par un dixième des députés, mais plus curieux encore « elle ne peut intervenir que par un vote à l’Assemblée nationale au scrutin secret à la majorité des trois cinquièmes des membres qui la composent [soit au moins 68 députés] »[24]. Il y a là une véritable source d’impunité et de déni de justice. Les tentatives avortées de mise en accusation du président Mahamadou Issoufou au Niger entre 2014 et 2015 en sont une parfaite illustration (Dabonez, 2016, 252.).

Pour diluer la forte dose de politisation de cet important mécanisme de lutte contre la corruption et infractions assimilées, sa saisine devrait être ouverte aux citoyens dans le cadre de l’exercice du droit de pétition. En réalité, sans cette ouverture procédurale, le mécanisme n’aura aucune chance de fonctionner. Les enseignements de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 février 2018 dans l’affaire de la demande de destitution du professeur Alpha Condé de ses fonctions de président de la République sont instructifs sur la question.

En l’espèce, c’est le président du Parti de l’unité et de la solidarité (PUL), Monsieur Oumar Bah, qui saisit la Cour constitutionnelle le 6 novembre 2017 d’une requête en destitution de l’actuel président de la République pour violation des articles 23 (obligation de l’Etat en matière de droits de l’homme), 38 (incompatibilité entre la charge de président de République avec l’exercice d’une fonction publique ou privée ; notamment l’exercice de responsabilités au sein d’un parti politique) et 45 (prérogatives du chef de l’Etat) de la Constitution du 7 mai 2010[25]. Il faut dire que si, dans cette affaire, l’avocat du président de la République a subtilement soulevé l’incompétence de la Cour constitutionnelle à connaître ladite affaire combinée pour défaut de qualité du requérant, les juges de la Cour ont eu l’habileté de rendre une décision courageuse mais atypique.

En effet, la Cour, après de longues constatations a conclu que l’absence matérielle de la Haute cour de justice, compétente dans cette affaire, est imputable aux pouvoirs exécutif et législatif qui disposent du pouvoir concurrent d’initiative de la loi. Le pouvoir législatif dispose de la compétence exclusive de légiférer. Dans sa lancée, la haute juridiction soutient, ainsi, que l’ineffectivité de cette juridiction viole le principe d’égalité constitutionnelle entre citoyens. En réalité, « la nécessité d’une justice pénale suffisamment forte et indépendante pour garantir l’égalité de tous devant la loi constitue le socle d’un Etat de droit » (Quemener, 2014, 29).

Ainsi, en fixant, aux pouvoirs publics, un délai de quatre mois (22 février 2018-22 juin 2018) pour l’adoption de la loi organique prévue à l’article 121 de la Constitution du 7 mai 2010[26], la Cour constitutionnelle exige clairement une prise en compte et une mise en œuvre effective des normes édictées depuis 2010 et dédiées à la moralisation de la vie publique, à la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption. Mais c’est surtout la déclaration faite par la Cour dans le dispositif de son arrêt qui retient notre attention. Elle déclare, en effet, que « passé ce délai [… elle] avisera ainsi qu’il appartiendra » et « qu’en attendant l’expiration de ce délai la Cour constitutionnelle doit se déclarer incompétente pour ladite affaire »[27].

Cette décision est riche d’enseignements. Elle soulève des questions non résolues comme celles de savoir si la Cour constitutionnelle est habilitée à donner de tels délais aux pouvoirs publics ; mais également en cas d’inobservation de ses injonctions, comme c’est le cas en l’espèce, jusqu’où peut-elle aller concrètement ?

A travers cet arrêt, la plus haute juridiction du pays pointe surtout le manque de volonté de faire de la Haute cour de justice une réalité. Elle souligne également la nécessité d’apporter des correctifs dans le fonctionnement de cette juridiction en devenir ou à défaut la supprimer pour soumettre le jugement des hauts responsables à une composition mixte (Cour suprême et Cour constitutionnelle) capable de se réunir à tout moment. L’expérience du Botswana et de l’Ouganda (Stepheson et Schütte, 2017, 11) qui ont tous deux expérimenté des sections ou des divisions anti-corruption au sein de leurs juridictions suprêmes pourrait être envisagée pour le cas guinéen.

 

II. Une volonté politique diffuse de lutte anticorruption

Il y a lieu de souligner que le niveau de corruption particulièrement élevé en Guinée comporte des conséquences multiples. Les Guinéens, dans leur majorité, pensent que rien n’est fait pour diminuer l’ampleur du phénomène (Agence nationale de lutte contre la corruption (ANLC) et OSIWA, 2017, 79), a fortiori pour l’anéantir. Ils soutiennent que les efforts fournis par les pouvoirs publics par le biais de tous ces organes de lutte contre la corruption n’ont rien changé. Au contraire, le phénomène s’est aggravé depuis quelques années (Agence nationale de lutte contre la corruption (ANLC) et OSIWA, 2017, 79). Ces critiques justifiées sont confirmées à la fois par l’inertie des organes de lutte contre la corruption et par l’absence de ressources financières, matérielles et surtout humaines pour la mise en œuvre des normes prévues par les textes. Cela limite considérablement les actions des organes de lutte contre la corruption en accentuant la crise de confiance entre les citoyens et les gouvernants. Le dispositif institutionnel anticorruption nous offre ainsi une hypertrophie infructueuse (A) aggravée par une justice assez silencieuse sur les affaires de corruption (B).

 

A. Une hypertrophie institutionnelle inopérante

Après une décennie de production de normes constitutionnelles et législatives contre la corruption, la Guinée est encore au même niveau de corruption qu’en 2008. Cette persistance du phénomène est, nous l’avons souligné plus haut, largement due aux faibles moyens consacrés à cet aspect fondamental de toute politique de transparence et de bonne gouvernance. Les visées de cette politique sont économiques ou sociales. Entre réformes législatives hésitantes et réalisation latente des mesures édictées, les institutions de lutte contre la délinquance financière, en général, et la corruption en particulier n’ont que très peu évolué ces dernières années.

La pluralité d’organes qui y sont consacrés (1) n’a pu apporter pour l’heure le succès espéré. Le texte réglementaire prévu par l’article 156 de la loi anticorruption de juillet 2017 qui vise à définir les attributions, la composition, l’organisation et le fonctionnement de l’organe national anticorruption ne semble pas avoir apporté toutes les réponses aux exigences des règles et des principes internationaux relatifs à la lutte contre la corruption (2).

 

1. Une superposition des organes préventifs

Chaque Etat crée un certain nombre d’organes chargés de contrôler la gestion de ses finances publiques. Il peut s’agir d’organes politique (le Parlement), juridictionnel (la Cour des comptes) ou administratif. Si les deux premiers –qui exercent un contrôle externe– sont inhérents à tout système démocratique fondé sur l’Etat de droit, le dernier –qui effectue un contrôle interne– quant à lui, est modulable en fonction de chaque Etat. Le contrôle externe reste encore assez abstrait malgré son fondement constitutionnel. Et le contrôle interne –qui sera abordé ici– ne connaît pas non plus un véritable succès, ce malgré la multiplicité des organes créés. Il s’agit d’organes créés par l’administration pour s’assurer de l’efficience de la gestion de ses activités et de ses finances. C’est un contrôle interne opéré par l’administration par le biais de structures créées en son sein (Sacko, 2013, 18).

Appelés également corps de contrôle, les organes de contrôle interne comprennent, en principe, des corps d’inspection générale comme l’inspection générale d’Etat et l’inspection générale des finances ; et des corps d’inspections sectorielles internes chargées de « veiller au respect de l’application correcte des législations, réglementations et normes techniques par les services dépendant du département ministériel » (République de Guinée, Ministère du contrôle économique et financier, 2011, 3). Cette classification s’intéresse généralement à la vérification de la régularité de la gestion des finances publiques de l’Etat (Sacko, 2013, 18-19).

En matière de prévention, de détection et de répression de la corruption et des infractions assimilées en particulier, les organes de contrôle peuvent être classés en corps d’inspection générale, en corps d’inspections sectorielles et en corps de contrôle spécialisé comme la CENTIF (Cellule nationale de traitement des informations financières), l’ORDEF (Office de répression des délits économiques et financiers), la BCN-Interpol Guinée et la direction nationale des marchés publics (DNMP devant assumer les attributions jadis accordées à l’administration du contrôle des grands projets et des marchés publics, l’ACGPMP)[28] et l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) qui participent directement ou indirectement à la lutte contre la corruption dans la passation des marchés publics.

Malgré la volonté de réorganiser les organes internes de contrôle des finances publiques ou de lutte contre la corruption, plusieurs incohérences et dysfonctionnements subsistent encore. En effet, si le décret du 10 octobre 2018[29] a permis de placer l’IGE (inspection générale d’Etat) au cœur du dispositif en la désignant comme coordinatrice des corps de contrôle ministériels[30], il faut dire que des limites juridiques et fonctionnelles persistent encore.

Cette réforme ne procède pas, en effet, à une définition rigoureuse des compétences de l’IGE pour les distinguer au mieux de celles de l’IGF (inspection générale des finances)[31]. Au regard des similitudes de leurs attributions et de leur modus operandi, une organisation hiérarchisée de ces dernières aurait aidé à minimiser le coût de leurs actions tout en les rendant plus efficaces. Le fait que l’article 7 du décret du 10 octobre 2018 confère à l’IGE le statut « [… d’] institution administrative supérieure de contrôle administratif […] » est une réelle avancée. Mais celle-ci reste insuffisante dans la répartition des compétences. Pour arriver à une souplesse des fonctions des deux institutions, il est utile de procéder à une réforme de l’IGF qui permettra de limiter sa compétence au profit de l’IGE.

Ces réformes souhaitées pourraient s’avérer insuffisantes si certains organismes existants déjà et remplissant des missions analogues continuent d’exister. Il y a, en effet, un risque de chevauchement et de conflit de compétence entre ces instruments qui visent dans leur ensemble à optimiser l’efficacité du dispositif de lutte contre la corruption. Par exemple, le comité d’audit, créé par le décret du 8 février 2011[32], joue quasiment le même rôle que les deux corps d’inspection générale, à l’IGE et l’IGF. Sa suppression permettra de rediriger les moyens financiers consacrés à la lutte contre la corruption vers l’agence nationale anticorruption ou l’inspection générale d’Etat.

La CNTIF et l’ORDF, chargés respectivement de la lutte contre le blanchiment des capitaux et de la lutte contre la délinquance financière et les crimes économiques, sont des organismes à composition mixte qui exercent des attributions analogues, en partie, à celles des inspections générales de contrôle et surtout à celles de l’institution nationale de lutte contre la corruption[33]. Avec la nouvelle donne créée par cet élan normatif pour une meilleure gouvernance, une autonomisation de l’institution nationale de lutte contre la corruption nous semble justifiée. A défaut, sa fusion avec les autres organismes dédiés à la lutte contre la corruption pourrait être la seconde option pour rendre l’ensemble du mécanisme plus lisible, plus cohérent et plus efficient.

Ainsi, les réformes qui doivent être entreprises dans le domaine des marchés publics par exemple seront poursuivies et renforcées par cette grande autonomie des institutions de contrôle.

L’ARMP (Autorité de régulation des marchés publics) devenue obsolète depuis peu doit être repensée pour espérer obtenir de meilleurs résultats dans la « bataille » contre la corruption. Il faudra également penser à un mode de saisine directe des tribunaux par les différents organes de contrôle pour limiter, voire freiner l’influence politique sur les acteurs de la lutte contre la corruption.

 

2. Une institution nationale anticorruption faiblement conforme aux principes internationaux

Les institutions nationales anticorruption sont régies par des principes internationaux découlant principalement d’instruments juridiques internationaux de lutte contre la corruption, mais aussi d’une soft law (les principes de Jakarta adoptés en 2012 dans le communiqué de Jakarta). Ils définissent les modalités de création, d’organisation et de fonctionnement de ces institutions. Ils sont pour celles-ci ce que sont les principes de Paris pour les institutions nationales des droits de l’homme (Badet, 2016, V). Il faut rappeler que les principes de Paris, adoptés par la résolution 48/134 de l’Assemblée générale des Nations unies du 20 décembre 1993, définissent les statuts des institutions nationales en charge de la promotion et de la protection des droits de l’homme ; ils fixent ainsi les modalités de leur création, de leur organisation et de leur fonctionnement.

Pour se conformer à l’esprit et à la lettre de l’article 156 de la loi anticorruption de juillet 2017, le président de la République a pris le 4 octobre 2018 un décret[34] définissant les attributions, l’organisation et le fonctionnement de l’organe chargé de la lutte contre la corruption et la promotion de la bonne gouvernance en Guinée. C’est sur la base de ces deux textes que nous allons évaluer la conformité des règles régissant cette institution avec les principes internationaux établis en la matière.

Certes, ce texte réglementaire intègre plusieurs exigences internationales mais il contient des prescriptions qui peuvent constituer un obstacle à l’effectivité des garanties offertes, et d’autres qui sont contraires aux engagements internationaux de la Guinée en matière de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.

Le premier regret, à mettre au compte du dispositif général anticorruption de la Guinée, tient à l’inobservation des principes de Jakarta sur la nature du fondement juridique du texte de création des institutionnelles anticorruption. Ces principes ont été adoptés lors de la conférence de Jakarta, organisée à l’initiative de la commission indonésienne pour l’éradication de la corruption (KPK), du programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), qui avait réuni plusieurs intervenants nationaux et internationaux sur la question. Ils définissent les statuts des institutions nationales anticorruption[35]. Ainsi, la nécessaire consécration par un texte législatif à défaut de constitutionnel est délaissée au profit d’un texte réglementaire[36]. Cette garantie juridique est exigée pour éviter toute immixtion de l’autorité administrative dans le fonctionnement des institutions nationales anticorruption.

L’inobservation de cette garantie n’a pas été compensée par d’autres portant sur l’indépendance de l’institution nationale guinéenne. Il s’agit de garanties financières, fonctionnelles et opérationnelles (Hussman, 2009, 13-14). Sur le plan financier par exemple, au terme de l’article 33 du décret du 4 octobre 2018, le budget de l’institution sera inscrit dans celui de l’Etat et élaboré par les services compétents de ce dernier. Mais une analyse de sa composition soulève de nombreuses interrogations. En effet, au terme de l’article 32 du même décret, il se sera composé d’une dotation de l’Etat, des subventions, des fonds versés par des partenaires, des dons, legs et toutes autres ressources légales. Son contenu laisse planer le risque de chantage financier des autorités exécutives qui pourront, en effet, bloquer ses actions ou ses investigations en la privant de moyens financiers. Mais il met surtout en exergue les carences de souveraineté de l’Etat guinéen qui soumet une prérogative souveraine (répression des infractions pénales, de la corruption) aux diktats des partenaires étrangers.

Par conséquent, si des mesures complémentaires ne sont pas prises, cette faible indépendance financière aura raison des larges prérogatives accordées à la future institution nationale anticorruption tant au point de vue fonctionnel qu’opérationnel par les textes. Comme en Sierra Léone et au Sénégal (Badet 2016, 12 et 27), l’institution bénéficiera, sous le contrôle de l’autorité judiciaire[37], des pouvoirs de poursuites directes et d’auto-saisine conformément aux articles 13 et 14 du décret 4 octobre 2018. Et dans le même sens, ses membres sont protégés contre les menaces et intimidations (article 25), contre toutes formes d’interférences (article 21) et d’une protection spéciale (article 23). Ils sont également assujettis aux obligations de déclaration de biens, de conflit d’intérêts, de dignité et d’exclusivité conformément aux articles 18 à 20 dudit décret.

Ainsi, même si l’institution nationale guinéenne de lutte contre la corruption ne bénéficie pas, comme c’est le cas en France[38], de pouvoirs de sanctions des manquements à certaines obligations qu’impose les contraintes liées au droit anticorruption, les garanties offertes auraient été suffisantes en l’absence d’une « tutelle présidentielle ». Pour garantir son efficacité et surtout l’effectivité de cette apparente indépendance, il faudra penser à lui conférer un statut d’autorité administrative indépendante. C’est-à-dire loin du pouvoir hiérarchique du président de la République.

Cette subordination organique[39] couplée à l’obligation de détention d’un ordre de mission de la tutelle [à savoir le président de la République] dans la réalisation de leur [les membres de l’institution nationale] mission[40] sont des handicaps sérieux à l’efficacité et à l’indépendance de l’Agence nationale anticorruption. Par conséquent, elle n’a qu’une indépendance relative dans l’exercice de ses attributions.

Il ressort de ces constats des limites juridiques et fonctionnelles qui amenuisent considérablement l’efficacité de la lutte contre la corruption telle que voulue par la Constitution du 7 mai 2010. La passivité de la justice sur les cas avérés ou supposés de corruption depuis 2010 amenuise considérablement la portée de l’incrimination constitutionnelle de la corruption en Guinée.

 

B. Une justice silencieuse

La répression des actes de corruption reste le second pilier du dispositif de lutte après les efforts et moyens de prévention. Sa réussite suppose des moyens suffisants et une réaction prompte et ferme de l’autorité judiciaire. Elle suppose la prise de sanctions pénales et financières à l’encontre des auteurs. C’est ce qui matérialise en partie l’effectivité du dispositif. Or, malgré les multiples révélations sur un nombre considérable de scandales de corruption en Guinée ces dernières années (1), les poursuites judiciaires sont inexistantes (2).

 

1. Un nombre accru de révélations sur des cas de corruption

Nonobstant donc l’existence de ce dispositif de lutte qui s’affine et se précise à coup de réadaptations législative et réglementaire depuis 2010, le nombre croissant de révélations de cas de corruption et l’inertie judiciaire qui en ont suivi contraste avec la volonté exprimée dans ces divers instruments juridiques. Cette situation illustre parfaitement l’insuffisance, sinon l’inefficacité des réponses apportées jusque-là pour répondre à cette problématique majeure en matière de gouvernance. Pour illustrer ce contraste, il est utile d’évoquer quelques faits avérés ou supposés de corruption dénoncés par voie de presse ou par la société civile et qui n’ont eu aucune suite judiciaire.

Il ressort en effet de l’article 64 de la loi anticorruption de juillet 2017 que « Les dénonciations des cas de corruption faites par la presse sont des révélations crédibles, susceptibles d’être évaluées ou vérifiées de façon à permettre des poursuites judiciaires, sous peine d’engager la responsabilité de leur auteur ».

Parmi les affaires de corruption les plus emblématiques dénoncées en Guinée ces dernières années, il y a incontestablement l’affaire dite d’EDG (Electricité de Guinée) : établissement public à caractère industriel et commercial. Une affaire symptomatique de l’état de la corruption en Guinée.

En l’espèce, c’est l’ancien coordinateur général de l’entreprise de distribution d’électricité en Guinée, avec la complicité du fils du président Alpha Condé, qui est soupçonné de détournement de fonds. En effet, il avait été établi par des enquêtes journalistiques que, dans les procédures d’attribution de certains marchés publics dont celui de la distribution d’électricité en Guinée, il y a eu « … trafics d’influence et autres interférences qui ont permis à ASPERBRAS, société brésilienne, d’obtenir le marché de fourniture, d’installation et de mise en service d’une centrale thermique d’une capacité de production de 100 MW au fuel lourd (mazout) d’une valeur de 122 millions de dollars, et d’un second contrat d’une valeur de 133 millions de dollars pour l’achat de groupes électrogènes » (Guineepresse.info, 2013). Et ces montants ont été perçus « sans le moindre travail » (id.).

Un autre cas emblématique qui illustre l’ampleur du problème est celui de l’ancien ministre de l’Education nationale et de l’Alphabétisation. Ce dernier est accusé d’avoir pratiqué une surfacturation budgétaire de l’organisation des examens nationaux (brevet et baccalauréat - session 2017) à hauteur de quarante milliards de francs guinéens (Guineelive.com, 2016) (soit 3 882 000 €). L’opération est confirmée par un rapport de l’inspection générale d’Etat (id.). En lieu et place d’une procédure judiciaire, il est promu ministre de la Ville et de l’Aménagement du territoire (Drame, 2017)[41], six mois seulement après son limogeage du ministère de l’Education nationale[42] pour éviter une nouvelle grogne sociale. Ce sont au total plusieurs milliards de francs guinéens qui se seraient volatilisés, pendant ses sept années de gestion de ce ministère.

La troisième affaire à avoir tenu en haleine l’opinion et qui a fait l’objet d’un large traitement médiatique est l’Affaire dite « Sable Mining ». Dans cette autre espèce il n’y a également eu aucune suite judiciaire alors même que la procédure présentait la particularité d’avoir des incidences transfrontières. En l’occurrence, les autorités libériennes avaient engagé des poursuites à l’encontre des personnalités impliquées dans cette affaire guinéenne qui avait visiblement des ramifications jusqu’au Liberia voisin[43]. Plusieurs personnalités guinéennes de haut rang étaient d’ailleurs impliquées dans cette affaire aux saveurs diplomatiques, et parmi lesquelles le fils du président Alpha Condé. Malgré la remise en cause de plusieurs éléments du rapport de l’ONG britannique Global Witness à l’origine de l’enquête, des zones d’ombre subsistent et appellent à ce que la justice et les organismes guinéens de lutte contre la corruption s’y intéressent de près (Samb, 2018).

A ces affaires s’en ajoutent plusieurs autres restées sans suite judiciaire telles que l’affaire SOTELGUI (Société des téléphonies de Guinée)[44] ; l’affaire de corruption à l’ambassade de la Guinée au Brésil[45] ; mais aussi l’affaire SEG (Société des eaux de Guinée)[46]. Toutes ces affaires montrent bien que le phénomène de corruption persiste en Guinée malgré l’existence d’un arsenal législatif et règlementaire répressif. Cette persistance du mal est encore perçue, à tort ou à raison d’ailleurs, comme une fatalité, du fait du désintérêt des magistrats pour ce type d’affaires plutôt gênantes, surtout lorsqu’elles touchent des proches du pouvoir, mais aussi à cause d’une banalisation croissante de la pratique. Et tous ces éléments expliquent naturellement le niveau de faiblesse de l’institution judiciaire.

 

2. Un très faible taux de poursuite judiciaire

La justice guinéenne reste encore assez désarmée face à ce phénomène devenu endémique. Les prescriptions constitutionnelles en vue de lutter résolument contre la corruption ne sauraient être observées sans un appareil judiciaire fort. Cela implique bien sûr que celui-ci soit indépendant, actif et réactif face au phénomène. C’est une donnée essentielle de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance.

A ce jour, la justice guinéenne a connu peu d’affaires « judiciaires » de corruption d’agents publics touchant des hauts responsables particulièrement proches du pouvoir. Cette réalité qui n’est toutefois pas propre à la Guinée illustre les propos de Stéphane B. Engueleguele selon lequel, « […] il est difficile pour le dirigeant politique d’aller trop loin dans la répression de la corruption, car il risque de scier la branche sur laquelle il est assis, en se coupant de soutiens indispensables à sa survie » (Engueleguele, 2015, 33).

La justice guinéenne continue d’esquiver les affaires qui éclaboussent des personnalités de haut rang. Pourtant, ce type de procédures (poursuites et sanctions contre un dirigeant) apporte un capital symbolique important dans le travail d’enracinement de la lutte contre la corruption et l’impunité. Mais à défaut de saisir les hauts responsables ce sont généralement les personnes appelées les « seconds couteaux » qui sont « sacrifiées » sur l’autel de la promotion de la bonne gouvernance[47].

A cet effet, le procès dans les affaires OGP (Office guinéen de publicité) et OGC (Office guinéen des chargeurs) –procédure pendante devant la Cour d’appel de Conakry– est le seul qui a vu des hauts responsables guinéens poursuivis devant un tribunal depuis 2010. Le 4 juillet 2018 s’est ouvert le procès contre Paul Moussa Diawara, ancien directeur de l’OGP, Moussa Camara de l’OGC, et leurs comptables. Ils sont respectivement poursuivis pour le détournement de plus de trente milliards de francs guinéens (soit plus de 2 919 000 €) (Diallo, 2018) et de plus de vingt-cinq milliards de francs guinéens[48] (soit plus de 2 432 000 €).

Par ailleurs, le directeur général de la LONAGUI (Loterie nationale de Guinée), épinglé pour le détournement de 27 milliards de FG (2 511 840 euros), a été révoqué de ses fonctions. Cette affaire qui ne constitue pas encore un procès, a le mérite de porter sur une sanction administrative d’un proche du chef de l’Etat (Sylla, 2019).

 

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L’incrimination constitutionnelle de la corruption, censée révolutionner la pratique de la gouvernance publique en Guinée, n’a connu qu’un très faible succès ces dix dernières années. Au-delà de son caractère symbolique, cette incrimination n’a pas renversé une tendance à la profanation des biens publics qui a marqué les régimes précédents. Au contraire, la forte « politisation » de la société, doublée par « l’affairisme » étatique, a renforcé l’impunité, terreau de la grande corruption.

Par ailleurs, sur le plan théorique, le référendum constitutionnel du 22 mars 2020, très contesté, car boycotté par une grande partie de la communauté internationale dont la francophonie, l’Union européenne, l’Union africaine, la CEDEAO ; et les grands partis d’opposition ainsi que certaines organisations de la société civile, a entrainé un changement de l’ordre constitutionnel. Cependant, la nouvelle Constitution du 14 avril 2020 a maintenu l’essentiel du dispositif anticorruption de la Constitution du 7 mai 2010. Le principal reproche qui peut lui être fait, illustrant le recul de l’engagement politique anticorruption, est la suppression du principe de l’imprescriptibilité des crimes économiques et financiers. C’est certainement une manière pour certains politiques impliqués dans des scandales de corruption de s’assurer une garantie d’impunité.

Au vu des circonstances de l’adoption de la Constitution, visée en outre par un scandale de falsification, avant publication, de la version validée par le référendum contesté (Diallo 2020), , il est possible de faire le pari de son remplacement au départ du président Alpha Condé. Toutefois, le processus d’incrimination constitutionnelle du phénomène corruptif ne risque pas d’être remis en cause. Au contraire, il pourrait faire l’objet d’un renforcement.

 

Bibliographie

 

 

Livres

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-A. Sacko, « Mutations et réalités du contrôle des finances publiques en Guinée », RSJP (Revue des Sciences Juridiques et Politiques), UGLC – SC, n° 4, octobre 2013.

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-M. Soumah, « SOTELGUI : le Ministre Oyé Guillavogui et les 13 milliards par mois ! », www.guineelive.com/, consulté le 3/7/2018 à 12h.

-C. H. Trielpel, « Les Rapports entre le droit interne et le droit international », in Recueil des cours de l’Académie du Droit International de la Haye (RCADI), tome 1, 1923-I.

 

 

 

[1] Cf. James Wolfenson, président de la Banque mondiale, 2005.

[2] Sur le plan international, l’essentiel des instruments juridiques relatifs à la lutte contre la corruption a été adopté dans le cadre d’organisations internationales à partir des années 1990. Voir Fitzgerald, 2011, 20-31).

[3] La création en 1966 du Tribunal spécial pour les délits économiques par la loi 050/AN/66 du 28 février 1966. V. M. A. Drame, 2015, 14-33.

[4] Voir décret D/2000/017/PRG/SGG du 4 février 2000 portant création d’un comité national de lutte contre la corruption et moralisation des activités économiques et financières (première institution de ce genre).

[5] Conformément au paragraphe 2 du préambule de la Constitution du 7 mai 2010.

[6] Voir le paragraphe 3 du préambule de la Constitution du 7 mai 2010.

[7] Article 7, paragraphe 4 de la Constitution du 7 mai 2010 « Le droit d’accès à l’information publique est garanti à tous. ».

[8] Article 26 de ladite Constitution « Quiconque occupe un emploi public ou exerce une fonction publique est comptable de son activité et doit respecter le principe de neutralité du service public. Il ne doit user de ses fonctions à des fins autres que l’intérêt de tous ».

[9] Article 36 de la Constitution du 7 mai 2010 « Après la cérémonie d’investiture, et à la fin de son mandat, dans un délai de quarante-huit heures, le président de la République remet solennellement au président de la Cour constitutionnelle la déclaration écrite sur l’honneur de ses biens. // Les ministres avant leur entrée en fonction et à la fin de celle-ci déposent à la Cour constitutionnelle la déclaration sur l’honneur de leurs biens. […] ».

[10] Voir l’article 116 de la Constitution du 7 mai 2010.

[11] V. paragraphe 3 du préambule de la Constitution du 7 mai 2010.

[12] Ibid., p. 297.

[13] V. article 11 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités. V. aussi Verhoeven, 2000, 384.

[14] Voir les instruments de ratification des deux conventions in Agence nationale à la présidence de la République, chargée de la lutte contre la corruption et de la promotion de la gouvernance (ANLC), 2014, 4 et 51.

[15] Voir les paragraphes 4 et 6 du préambule et l’article 3, paragraphe 2 de la convention de l’UA sur la prévention et la lutte contre la corruption.

[16] V. les paragraphes 2 et 3 du préambule de la Constitution du 7 mai 2010.

[17] V. les articles 7, 26, 36 et 116 de la Constitution du 7 mai 2010.

[18] V. les articles 18, 19, 23, 25 à 30 et 94 de la loi n° 0041/2017/AN portant prévention, détection et répression de la corruption et des infractions assimilées du 4 juillet 2017.

[19] Titre VIII, articles 85-86, de la loi fondamentale du 23 décembre 1990 (révisée par le décret D/2002/48/PRG/SGG du 15 mai 2002, promulguant la loi constitutionnelle adoptée par référendum du 11 novembre 2001).

[20] Loi organique L/91/009 du 23 décembre 1991 portant attributions, organisation et fonctionnement de la Haute cour de justice et fixation de la procédure suivie devant elle.

[21] Voir l’alinéa 3 de l’article 117 de la Constitution du 7 mai 2010.

[22] Conformément à l’article 118 de la Constitution du 7 mai 2010.

[23] Ibid.

[24] Conformément à l’article 120 de la Constitution du 7 mai 2010.

[25] Cour constitutionnelle (Guinée), arrêt n° AC 04 du 8 février 2018, Affaire de la demande de destitution du professeur Alpha Condé de ses fonctions de président de la République.

[26] Cour constitutionnelle (Guinée), arrêt n° AC 04 du 8 février 2018, Affaire de la demande de destitution du professeur Alpha Condé de ses fonctions de président de la République.

[27] Ibid.

[28] V. la loi L/2018/027/AN du 5 juillet 2018 fixant les règles de gouvernance des projets publics en République de Guinée.

[29] V. décret D/2018/246/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’inspection générale d’Etat.

[30] Conformément à l’article 1er, paragraphe 3 du décret D/2018/246/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’inspection générale d’Etat.

[31] V. les articles 2 et 3 du décret n° D/2012/124/PRG/SGG portant attribution, organisation et fonctionnement de l’IGE et statut de ses membres, remplacés par les articles 3 et 4 du décret D/2018/246/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’inspection générale d’Etat, et les articles 1 à 3 du décret D/2013/N°007/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’IGF et statut de ses membres.

[32] V. les articles 1 à 3 du décret D/2011/029/PRG/SGG portant attribution du comité d’audit.

[33] V. les articles 19, 28 à 34 de la loi n° L/2006/010/AN relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux en République de Guinée.

[34] Décret n° D/2018/241/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’organe chargé de la lutte contre la corruption et de la promotion de la bonne gouvernance du 4 octobre 2018.

[35] V. communiqué de Jakarta sur les principes sur les institutions de lutte contre la corruption, adoptée à Jakarta du 26 au 27 novembre 2012.

[36] V. le 3e principe du communiqué de Jakarta.

[37] V. l’article 28 du décret n° D/2018/241/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’organe chargé de la lutte contre la corruption et de la promotion de la bonne gouvernance du 4 octobre 2018.

[38] Voir l’article 5 du décret n° 2017-329 du 14 mars 2017 relatif à l’Agence française anti-corruption et l’article 17 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

[39] Selon l’article 2 du décret n° D/2018/241/PRG/SGG portant attributions, organisation et fonctionnement de l’organe chargé de la lutte contre la corruption et de la promotion de la bonne gouvernance du 4 octobre 2018, « L’Agence nationale de lutte contre la corruption et de promotion de la bonne gouvernance (ANLC) rattachée à la présidence de la République est dotée de l’autonomie financière ».

[40] V. l’article 26 du décret n° D/2018/241/PRG/SGG du 4 octobre 2018.

[41] Voir aussi le décret D/2017/235/PRG/SGG du 23 août 2017, portant nomination de membres du Gouvernement.

[42] Conformément à l’article 1er, paragraphe 3 du décret D/2017/049/PRG/SGG du 27 février 2017, portant nomination de membres de gouvernement.

[43] Kaloum Presse avec l’AFP, « Affaire Sable Mining : premières interpellations au Liberia », in www.kaloumpress.com/, consulté le 3/7/2018 à 10h.

[44] Cette affaire porte sur l’utilisation opaque des installations de la SOTELGUI par des fournisseurs d’internet et des banques privées avec la complicité de l’ancien ministre des postes et télécommunications et actuel ministre d’Etat à l’environnement avec la complicité de l’Inspecteur Général du département. Voir Soumah, 2018.

[45] Collectif contre l’impunité en Guinée, « Urgent/ Un réseau de corruption de haut-cadres guinéens sous enquêtes au Brésil », in www.leguepard.net/, consulté le 3/7/2018 à 12h 30.

[46] Lettre du directeur général adjoint de la SEG, chargée de l’exploitation et de la qualité, du 7 novembre 2017, adressée au président de la République.

[47] Dans l’affaire des treize milliards de francs guinéens par exemple, le président de la République après avoir promis des sanctions prendra quelques jours après un décret à l’encontre de deux plantons et quelques cadres du ministère de l’Economie et des Finances.

[48] Voir la lettre n° 2018/0902/MEF/CAB/CJ du 4 mars 2018 de Madame la Ministre de l’Economie et des Finances adressée à Monsieur le premier ministre, chef du gouvernement portant la mise en œuvre des directives présidentielles, sur l’Office guinéen des chargeurs (OGC) et sur l’Office guinéen de publicité (OGP).

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