N°4 / Violences contemporaines : la prison en question en Afrique de l'Ouest

Réprimer le terrorisme et protéger les droits humains

le droit malien peut-il réussir le test de proportionnalité ?

Seydou Mallet, Enseignant Vacataire, Université Des Sciences Juridiques Et Politiques De Bamako, Bouréma Kansaye, Enseignant Chercheur, Université Des Sciences Juridiques Et Politiques De Bamako

Résumé

Les règles pénales maliennes ont subi récemment une profonde et renforçant mutation, s’expliquant par une très grande volonté de rendre efficace l’action judiciaire en matière de lutte contre le terrorisme. Ces réformes, réalisées par le législateur, ébranlent gravement les droits humains et libertés fondamentales des présumés terroristes. Ces types de délinquants sont considérés comme des ennemis de la communauté, de la société d’où l’appellation « droit pénal de l’ennemi », modèle sur lequel s’appuie le législateur. Si le terrorisme est une vraie menace pour un Etat, le combattre l’est tout aussi car l’Etat est garant des droits et libertés fondamentaux des délinquants également.

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Les Etats africains, comme beaucoup d’autres Etats dans le monde, sont confrontés au terrorisme, un phénomène qui n’est certes pas récent, mais qui prend depuis quelques années des proportions importantes. Un tel mode de revendication, qu’il soit politique, idéologique ou religieux ne peut pas être con forme aux principes qui gouvernent notre système d’Etat de droit démocratique.

Il y a longtemps, le législateur malien avait réaménagé son arsenal répressif pour être en phase avec la lutte menée par la communauté internationale contre ce phénomène de terrorisme avec l’adoption d’une loi en 20081. Plus d’une décennie après, le même législateur n’a cessé de vouloir adapter cet arsenal aux évolutions du terrorisme2. Il entend ainsi apporter des améliorations importantes à ladite législation.

C’est ainsi qu’en 2010, une loi3 a été adoptée puis abrogée et remplacée par celle du 17 mars 20164. En 2013, une autre loi a été votée, introduisant dans le Code de procédure pénale, des règles spécifiques en matière de procédure5. C’est cette loi qui a institué le pôle judiciaire spécialisé, structure compétente pour connaître les procédures contre le terrorisme. Ces différents instruments juridiques ont conduit à modifier le système pénal de lutte contre le terrorisme dont l’affaire Ministère public contre Ousmane AHMAYED est un exemple éclairant6.

Ces réformes se justifient par la volonté d’une plus grande efficacité des politiques publiques contre le terrorisme. Le modèle sur lequel s’est fondé le législateur semble conduire vers celui que l’on dénomme « droit pénal de l’ennemi ». Cet ennemi est identifié d’une façon générale, avec un type criminologique d’auteur dangereux7. Si le terrorisme est un danger pour les Etats de droit, la lutte effrénée contre le terrorisme l’est tout autant.

Au Mali, la loi de 2008 tente de définir le terrorisme au 1er chapitre par certains actes qui sont une sorte de ratissage à travers les textes internationaux sur le terrorisme8.

Quant à la convention d’Alger de 1999 ou convention africaine contre le terrorisme, elle propose une définition de l’acte de terrorisme en son art. 1(3) : il s’agit d’un acte prémédité ; le terrorisme peut exister au nom de système politique.s, religieux, socio-économiques ou autres croyances : Les objectifs du terrorisme sont souvent la peur, l’extorsion et un changement radical.

En effet, dans son article 1 alinéa 3, la convention africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme9 définit l’acte terroriste comme : « Tout acte ou menace d’acte en violation des lois pénales de l’Etat partie susceptible de mettre en danger la vie, l’intégrité physique, les libertés d’une personne ou d’un groupe de personnes, qui occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens publics ou privés, aux ressources naturelles, à l’environnement ou au patrimoine culturel, et commis dans l’intention :

-d’intimider, provoquer une situation de terreur, forcer, exercer des pressions ou amener tout gouvernement, organisme, institution, population ou groupe de celle-ci, d’engager toute initiative ou de s’en abstenir, d’adopter, de renoncer à une position particulière ou d’agir selon certains principes ;

-de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation des services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations ;

-de créer une insurrection générale dans un Etat partie.

En tirant une inspiration de tout ce qui précède, on peut proposer une définition du terrorisme, qui serait une forme de combat idéologique qui imprime la peur délibérément ou cause la violence par la menace ou l’action et/ou exploite la peur pour atteindre des objectifs religieux (musulmane généralement), politique. Celui qui utilise cette forme de violence est un terroriste, qui n’hésite pas à semer la terreur par le moyen d’une guerre asymétrique et de tueries massives.

Cette convention d’Alger avait contraint les Etats parties à accepter de réviser leur législation nationale et à établir comme crimes les actes terroristes tels que définis dans ladite convention et pénaliser ces actes en tenant compte de leur gravité10. Quant aux droits humains, c’est un ensemble de droits, libertés et prérogatives reconnus aux hommes en tant que tels11 , c’est-à-dire inhérents à leur seule qualité d’être humain.

Théorisé par Gunther Jacobs, le droit pénal de l’ennemi, qui s’inscrit dans la tradition initiée par Von Liszt et intègre des conceptions du droit de punir que ne renierait pas Carl Schmitt, consistait à l’origine, à relever l’existence d’incriminations qui anticipent la répression sur l’iter criminis en considération de la dangerosité sociale présumée d’un auteur qui, se comportant en citoyen déloyal et se plaçant ainsi au ban de la communauté politique, serait privé de certains droits que seule l’allégeance citoyenne permet de réclamer12.

Plus précisément, l’auteur postule qu’il « est possible de proposer un critère de distinction : l’aspect personne fait un pas en arrière et l’aspect ennemi vient sur le devant, quand les droits de la personne sont réduits, par ce qu’on ne peut plus attendre de la personne un comportement conforme à la loi dans l’avenir, et que ce comportement non conforme est quelque chose de durable (…) La dangerosité de l’individu détenu prime sur tout, il est l’ennemi de la société, il n’est plus un citoyen libre, il n’est plus un citoyen qui a la pleine jouissance de tous ses droits »13. Cet ennemi est généralement victime de son milieu dans lequel il est grandi, allusion est faite ici au facteur milieu éducatif, son environnement socio-économico-politique.

A la suite des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, plusieurs Etats ont adopté contre la montée en puissance du phénomène terroriste des mesures excessives de protection et une réaction juridico-pénale très sévère14. Dans ce cas, on pourra dire que le droit criminel légitime le passage du droit pénal du délinquant de droit commun au droit pénal de l’ennemi15. Ce sont ainsi les principes du droit pénal qui sont mis à mal ainsi que les règles fondamentales de l’Etat de droit.

L’ennemi est défini comme un guerrier plongeant le Code pénal dans une autre dimension, celle de la militarisation des infractions et des valeurs. Ce qui veut dire que l’ennemi appelle une lutte, une guerre impropre à un processus judiciaire serein et perturbateur de garanties fondamentales16.

On entend par proportionnalité le principe d’adéquation des moyens à un but recherché. Le test de proportionnalité est relatif ici au degré de répression en fonction du principe établi en matière du respect des droits humains.

La modernisation du système pénal malien vise à neutraliser le terroriste comme étant l’ennemi de la société. Cette mutation du droit pénal est fondée sur des pratiques dégradantes de punitions destinées à combattre ce danger de la société. L’application de certaines dispositions de nos textes montre que notre loi pénale met en cause les garanties procédurales et porte atteinte à certains droits humains.

L’articulation de la réponse pénale face au phénomène terroriste dans le respect des droits humains demeure pour tout spécialiste du droit pénal, pour tout juriste en général un sujet d’une importance particulière d’où la question : comment le droit malien peut-il réussir le test de proportionnalité ? Afin de proposer une réponse à cette question, il convient de démontrer qu’il existe une défaillance dans la réponse pénale face au terrorisme (I) et des insuffisances ou une méconnaissance de protection des droits humains entraînées par ces mesures (II).

 

I. Une défaillance dans la réponse pénale face au terrorisme

Force est de constater que la réponse pénale face au terrorisme est imprécise. La tentative de modernisation de la législation malienne laisse une évidence dans l’application dissimulée du droit pénal de l’ennemi. On pourra reprocher à cette modernisation d’avoir éclipsé le principe de légalité criminelle. Or c’est un principe qui est fondamental en matière pénale en général, et particulièrement en droit pénal de fond17. Il implique dans ce dernier domaine cité qu’aucun comportement ne soit puni, qu’aucune sanction ne soit infligée sans une disposition légale préalable. Idéologiquement, le principe de légalité est soutenu par le « droit à la sécurité juridique »18 et à « la liberté individuelle »19. Formellement, il repose sur les textes internationaux20 et nationaux21 et impose au législateur de prendre des textes clairs et précis. La loi malienne sur le terrorisme ne semble pas respecter cette obligation car elle manque de définition claire de la notion du terrorisme et par l’usage de termes vagues dans sa formulation. Il serait intéressant de détailler les imprécisions de la politique de répression (A) et des règles procédurales (B).

 

A. L’imprécision des règles de répression ou des textes applicables 

Incriminer le terrorisme s’est pourtant révélé une tâche difficile pour les Etats. Ainsi, « l’acte d’incrimination a été confronté à deux types de difficultés liées aux formes de cette criminalité. Premièrement, le terrorisme est une criminalité polymorphe. Deuxièmement, malgré leur spécificité, les actes de terrorisme prennent le plus souvent la forme d’un comportement déjà incriminé par le droit commun : un meurtre, une prise d’otage, une destruction de biens, ou encore le détournement d’un moyen de transport »22. Le défi d’une incrimination est donc de saisir l’ensemble des comportements terroristes malgré leur proximité avec les incriminations de droit commun et leur irréductibilité à un comportement unique.

 

1. L’extension arbitraire des incriminations terroristes

Au Mali, la volonté du législateur à travers la loi malienne n° 08-27/AN-RM du 23 juillet 2008 reste inachevée puisqu’il laisse planer un doute sur la notion même du terrorisme23. Celui-ci préfère, en lieu et place d’une définition expresse, une énumération comme son titre l’indique « Des actes de terrorisme ». Face à l’impossibilité de définir objectivement la notion de terrorisme, le législateur malien a opté pour une incrimination élargie pour saisir tous les types de terrorisme. Plusieurs comportements réprimés déjà en droit commun, sont repris, sauf que c’est le but visé qui les bascule dans le champ des infractions terroristes.

Cette loi ne fait qu’emprunter aux différentes conventions internationales leurs listes d’actes terroristes, car elle ne parvient pas à définir le terrorisme Il est clair « qu’aucune législation ne donne ‘’convenablement’’24 une définition du terrorisme, une telle option d’incrimination affaiblit le principe de légalité de façon considérable, voire même l’État de droit ». Cela montre la complexité à conceptualiser le phénomène. Vu l’absence d’une définition globale du terrorisme, il pourrait y avoir une instrumentalisation du phénomène par les États, qui peuvent profiter de cette absence de définition pour régler des problèmes politiques conduisant ainsi à une violation des droits humains, etc.

 

2. L’exacerbation des exceptions aux principes directeurs du droit pénal

L’atteinte portée au principe de légalité par la rédaction de la loi de 2008 se manifeste par l’usage des termes vagues sinon au niveau de l’aspect formel, c’est-à-dire l’exigence d’un texte écrit, le législateur a satisfait au respect du principe. Or, il est fait au législateur une obligation de précision dans la formulation des incriminations25, afin de neutraliser la tentation de certains juges de les étendre au-delà de leur esprit ou de l’intention de l’auteur. Le recours aux termes vagues dans la formulation des lois de façon générale et particulièrement des lois pénales est décrié par une certaine doctrine. C’est le cas de Maurice Hauriou26 qui souligne que « chaque loi est une chaussée publique bien pavée sur laquelle on peut marcher avec assurance autrement dit la formulation d’une loi permet une sécurité en matière de prévisibilité ». Il s’agit ici d’assurer en tout état de cause l’intelligibilité et la compréhension de la loi par tous.

Pour André Akam-Akam, « l’imprécision des termes, leur mauvais emploi ou encore l’imprécision des phrases constituent des barrières à la compréhension de la loi »27. Ce qui veut dire qu’un texte lisible est par exemple un texte facile, autrement dit compréhensible. La loi ne doit faire l’objet d’aucune ambiguïté.

Les rédacteurs de la loi de 2008 portant sur le terrorisme ne semblent pas prendre en compte l’exigence de précision dans la formulation des infractions. En effet, on peut se demander ce que signifie cette formulation « Lorsque, soit par leur (…) ils visent à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque »28. Il s’agit des termes vagues, au contenu mal délimité, car une telle formulation que seul le législateur comprend ne rend pas intelligible la loi. Il est le seul à apprécier non seulement le trouble que cela peut causer et à déterminer aussi les sanctions.

Il faut souligner l’intérêt de la définition selon les juristes pénalistes ; en droit pénal, le principe de légalité est fondamental. La légalité des délits et des peines (nullum crimen nulla poena sine lege) est un principe suivant lequel l’infraction doit être définie avec la plus grande précision afin que des sanctions puissent être appliquées. Selon eux, ce principe signifie qu’une sanction ne peut être appliquée que pour un acte qui a été préalablement défini par la loi. Formellement, il repose sur les textes internationaux29 et nationaux30 et impose au législateur de prendre des textes clairs et précis. Par conséquent, lorsque la définition de l’acte délictueux est insuffisamment précise, le doute profite à l’accusé en vertu du principe d’interprétation stricte de la loi pénale31.

La raison est évidente : sans une définition précise du terrorisme, il peut être aisé de qualifier de terrorisme des activités qui ne le sont pas. N’est-ce point cela qui est en train de se produire un peu partout dans le monde ? Pour améliorer l’efficacité de la réponse judiciaire, cela passe notamment par le renforcement de leur capacité à traiter de manière singulière des procédures singulières

 

B. Une ambiguïté des règles de procédure, source d’arbitraire et d’épreuve pour les droits de la défense

 

On ne surprendra personne en disant que la procédure pénale applicable au terrorisme est placée sous le signe de l’exception. Face au terrorisme, les législateurs nationaux doivent agir pour mettre en place une législation efficace afin de prévenir les actes et le cas échéant, sanctionner leurs auteurs32.

Le développement du terrorisme et la nécessité de la protection étatique ainsi que les valeurs humaines ont conduit à une profonde réflexion pour développer des moyens de lutte antiterroriste33. En raison de la complexité des faits de terrorisme et leur dangerosité, des règles dérogatoires au droit commun ont été introduites dans la législation malienne34.

Ainsi, avec la loi n° 2013- 016 du 21 mai 2013, le législateur a montré un visage opérant pour le tout répressif car il a accru les pouvoirs d’investigation des autorités chargées de l’enquête. Les investigations reposent sur des méthodes d’enquêtes intrusives et restrictives des libertés et droits fondamentaux. Cela se manifeste par le développement de nouvelles techniques mises à leur disposition avec notamment le renforcement des pouvoirs des enquêteurs en la matière.

Les nouvelles mesures autorisées pendant la phase d’enquête mettent en lumière des moyens de contraintes disproportionnés contre les droits humains. Il s’agit de la garde à vue, des visites domiciliaires ou perquisitions et des écoutes téléphoniques.

 

1. La garde à vue en matière terroriste, un volet fragilisant les droits des présumés innocents

La garde à vue « est une mesure particulièrement contraignante de rétention et donc de privation de liberté effectuée par la police ou la gendarmerie, qui détient seule en l’espèce un large pouvoir en décidant du début de la garde à vue »35. Le placement de la garde à vue intervient au cours d’une enquête préliminaire ou de flagrant délit. C’est un moment crucial dans le procès pénal puisqu’elle est la première occasion pour celui qui en fait l’objet d’entrer sérieusement en contact avec le système répressif.

En effet, « la garde à vue est un moment clef de l’enquête, car loin d’être uniquement le moyen de garder un suspect à « vue » ; elle constitue un moment privilégié pour obtenir des informations à la source, un moyen de pression en vue de la coopération du suspect »36. Cette façon d’inciter le suspect à collaborer l’amène souvent à coopérer effectivement, surtout s’il n’est lié qu’indirectement et qu’il peut par-là, fournir des indices importants pour l’enquête. Ce mécanisme se détache donc « du droit commun par la possibilité d’en prolonger la durée au-delà des délais ordinaires, ce qui n’est pas sans effet sur les conditions de l’intervention de l’avocat »37. Il est toutefois original et repose sur des garanties de la liberté individuelle : elle est en effet, soumise à une autorisation donnée à la requête du procureur de la République.

La garde à vue démarre généralement au moment de l’interpellation de l’individu par les forces de l’ordre selon certaine doctrine, pour d’autres c’est au moment de sa présentation dans les locaux des services d’enquête. L’un ou l’autre cas doit faire aussitôt l’objet d’un procès-verbal de notification de début de garde à vue et d’enregistrement sur un registre spécial tenu au lieu de détention.

Cette étape de garde à vue est très importante dans l’enquête. Elle permet de rechercher les complices de tels actes, ce qui pourrait allonger la durée des interrogatoires et, donc, de la garde à vue. En effet, on pense que l’allongement de la garde à vue peut constituer un moyen de pression pour l’individu concerné ; et surtout pour celui qui n’est lié qu’indirectement et qu’il peut, par-là, fournir des indices importants pour l’enquête.

La loi a prévu des modalités d’exécution de la garde à vue, qui portent atteintes aux gardés à vue. La lutte contre le terrorisme dans laquelle le Mali s’est engagé à apporter beaucoup de modifications dans l’arsenal juridique malien. La durée de la garde à vue selon le Code de procédure pénale de 2001, est de quarante-huit heures. Cette règle ne reçoit pas application dans les situations particulières comme le terrorisme. Ce délai peut être prolongé de vingt-quatre heures s’il existe contre une personne des indices graves et concordants de nature à motiver son inculpation et sur autorisation écrite du procureur de la République38. Au Sénégal par exemple, en la matière, le législateur pénal sénégalais n’a pas modifié la durée initialement prévue par la loi n° 2007-01 du 12 février 200739, en fixant un délai pouvant aller jusqu’à douze jours40. Ce qui par exemple, explique que l’imam Alioune Badara Ndao, arrêté le 27 octobre 2015 à son domicile à Ngane dans la commune de Kaolack, a été présenté onze jours après son arrestation, au juge d’instruction. Il l’a inculpé ensuite pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, blanchiment de capitaux dans le cadre d’activités terroristes en bandes organisées et complicité, entre autres chefs d’accusation.

À partir de là, l’on serait fondé de partager la crainte exprimée par certaines organisations sénégalaises de promotion et de protection des droits humains41. À vrai dire, les personnes inquiétées dans une affaire de terrorisme doivent attendre douze jours42 avant d’être présentées devant un juge instructeur. Ce qui constitue une violation flagrante du droit à la liberté personnelle et les expose à toutes formes d’abus et d’atteintes à son droit à un procès équitable.

La loi modifiant le Code de procédure pénale de mai 2013 dispose que pour les auteurs présumés d’infractions terroristes ou de crime transnational organisé et leurs complices, la durée de la garde à vue est de quarante-huit heures ; ce délai peut être renouvelé trois fois pour la même durée. L’autorisation écrite du procureur de la République ou du juge d’instruction est nécessaire toute les quarante-huit heures à compter de la décision de placement en garde à vue43. Cela veut dire qu’un citoyen innocent peut être gardé par les forces de sécurité pendant 192 heures. Aussi, aucune compensation n’est prévue si l’enquête préliminaire prouve que le suspect gardé à vue pendant huit jours est innocent de tout acte, ou même de complicité active ou passive, de terrorisme. Tout ceci doit faire l’objet d’une réflexion vu l’importance de la liberté pour une personne et d’éventuels préjudices que cela peut engendrer dans la vie d’une personne.

Il convient de signaler que les conditions des personnes gardées à vue ne sont pas loin souvent de l’acharnement. Les dispositions relatives à la garde à vue révèlent l’institution d’une privation de liberté illimitée. Le silence de la loi de 2013 porte une atteinte au droit d’être entendu équitablement et dans un délai raisonnable. Le suspect d’actes terroristes peut être alors détenu tout le temps nécessaire à la clôture de l’enquête par délégation judiciaire. La bavure doit être proscrite, le parquet doit veiller sur les délais de garde à vue. Ce dépassement du délai légal est en passe de devenir un principe consacré par nos enquêteurs et son contraire souhaitable une exception.

Il faut toutefois noter néanmoins que huit jours de garde à vue est souvent peu pour une affaire de terrorisme, compte tenu du fait que le terrorisme concerne d’abord le pays tout entier. Les terroristes font partie de réseaux d’association de criminels malfaiteurs. Avoir des preuves que le présumé terroriste est impliqué ou non dans une affaire liée au terrorisme prend du temps, vu souvent la dimension internationale de l’enquête.

Nous partageons l’avis de Julie Alix qui affirme que la garde à vue, permet non seulement aux enquêteurs d’obtenir des informations à la source, mais aussi un moyen de « pression en vue de la coopération du suspect »44. Ces raisons font que l’allongement même au-delà de ce qui est prévu peut-être justifié. Le gardé à vue dispose de très peu de droits. Il n’est nulle part fait état de son hygiène corporelle, des possibilités qu’il a de s’alimenter, de se reposer, des conditions matérielles dans lesquelles il doit être gardé. Aussi, la garde à vue des blessés et les malades ne fait l’objet d’aucune disposition particulière, même s’il a le choix de se faire examiner par un médecin de son choix, force est de constater qu’il n’y a pas des locaux bien aménagés pour la garde à vue d’un individu nécessitant l’hospitalisation.

Pour pallier ces lacunes, il faudrait procéder au recrutement de psychologues, d’experts-conseils, exécution d’analyses d’ADN, d’empreintes digitales, vocales, d’examens balistiques. Il serait impératif aussi de mettre des moyens logistiques destinés à assurer la mobilité du personnel chargé des enquêtes (véhicules tous terrains, moyens de communication audiovisuelle…) et la formation technique et juridique de ce personnel.

En plus de la garde à vue, les perquisitions font également l’objet d’une procédure particulière.

 

2. Les perquisitions, intervention de professionnels aguerris et expérimentés

Une perquisition est décidée lorsqu’on estime qu’elle pourra donner des informations supplémentaires, comme par exemple des preuves, afin de faire la lumière sur une enquête criminelle. Il faut noter que, « pour les enquêtes liées aux terrorismes, les perquisitions sont régies par des règles dérogatoires qui autorisent, dans certaines conditions, leur exécution en dehors des heures légales »45. Ainsi, « les caractères des infractions relatives au terrorisme ont, justifié l’application des règles dérogatoires applicables en matière de perquisitions »46.

Les perquisitions ou visites domiciliaires se définissent « comme la recherche à l’intérieur d’un lieu normalement clos, notamment au domicile d’un particulier, d’indices permettant d’établir l’existence d’une infraction ou d’en déterminer l’auteur »47. En droit commun, les perquisitions peuvent être effectuées dans le cadre de trois régimes différents, à savoir le cadre de flagrance, l’enquête préliminaire, où instruction. Les perquisitions revêtent un caractère différent selon la nature de l’infraction recherchée ; l’infraction terroriste par exemple.

Elles sont des recherches d’éléments de preuve d’une infraction au domicile d’une personne ou dans les locaux d’une entreprise. Son but fait d’elle une véritable atteinte au principe de l’inviolabilité du domicile surtout garantie par la constitution du Mali48. Mais, « cela se fait dans le cas où il existe des indices faisant fortement présumer la commission ou la tentative de commission d’actes terroristes ou de crime transnational organisé »49 et devient normal dès que c’est justifié par une menace terroriste. D’où le risque, car n’importe quel fonctionnaire pourrait avec diligence brandir une menace terroriste justifiée ou non, pour violer le domicile de n’importe quel citoyen.

Pour respecter le principe sacro-saint de protection de la famille et pour limiter ces violations, la loi les entoure de formalités suffisantes telles que la limitation de l’exécution de ces mesures au jour et jamais la nuit, et cela en raison du principe l’inviolabilité du domicile. Le domicile est perçu comme un espace de tranquillité, et l’après 21 heures est considéré comme un moment de sommeil et de rêve. Ces mesures qui étaient fortement encadrées par le Code dans le cadre du respect de l’inviolabilité du domicile sont devenues banales. En effet, les perquisitions et visites domiciliaires qui ne pouvaient commencer avant six heures et après vingt et une heure sauf réclamation faite de l’intérieur de la maison, peuvent désormais avoir lieu à tout moment en vue de renforcer l’efficacité de la lutte contre le terrorisme et les actes assimilés.

Il est important de noter qu’elles peuvent se faire sans la présence des personnes mises en cause50 sous réserve d’une autorisation de l’autorité judiciaire en charge de l’enquête. Cette dérogation au régime des perquisitions effectuées dans le cadre de l’enquête préliminaire n’est pas nécessaire en matière de flagrance ou de l’instruction. Le fait que le principe d’assentiment n’est pas requis dans le cadre de ces procédures, se justifie par la nécessité d’agir rapidement, pour rechercher, avant même l’ouverture d’une information judiciaire. Ces opérations peuvent également être justifiées par la gravité des infractions sur lesquelles porte l’enquête et par nécessité de prévenir un risque d’atteinte à la vie. Pour cela, il faut que la requête soit suffisamment motivée pour voir si les faits entrent dans le champ d’application des incriminations terroristes, et d’apprécier l’opportunité de la demande adressée au procureur de la République. Les pouvoirs des agents enquêteurs sont donc encadrés par le respect du formalisme relatif à l’accomplissement des mesures d’investigation.

Les recherches et constatations des infractions de terrorisme ne doivent pas être longues eu égard aux conséquences déplorables qu’elles engendrent. Afin de rationaliser sa durée, le législateur doit miser sur l’optimisation des ressources humaines et financières, mais aussi sur l’accroissement de l’efficience du déroulement des investigations. Concrètement, il s’agit d’augmenter le rendement de l’activité du personnel en spécialisant les investigateurs afin d’éviter que des affaires techniques et complexes ne ralentissent les affaires les plus simples. En outre, « la technique de la spécialisation peut être un moyen efficace de répression et de célérité »51 de la justice ; d’autant plus qu’une justice de qualité n’est pas uniquement celle qui rend des décisions conformes au droit, mais aussi et nécessairement celle qui les rend en temps utile ; sinon, elle devient inefficiente et inéquitable, car ne répondant plus aux attentes des justiciables.

Il est vrai que les terroristes sévissent mais en faire l’objet d’une descente policière aux environs de minuit, traumatise tout autant. La descente policière est excessive non seulement pour la personne recherchée, mais pour tous les membres de la famille et les voisins. C’est cette sorte de terrorisme d’État contre les libertés individuelles que le législateur a institué en votant cette loi.

Le terrorisme au Mali ne mérite pas que l’on sacrifie une partie de notre liberté et de nos droits pour le combattre. La première loi malienne antiterroriste s’est inspirée de quelques articles de la Constitution du 25 février 1992 élaborée par le sang des Maliens. Il s’agit du respect de la vie privée, du domicile et de la famille (article 6)52, la liberté d’expression (article 4)53, la présomption d’innocence (article 9)54. De tout ce qui précède, le choix malien en matière de juridiction compétente et de procédure spéciale applicable en cas de poursuite pour cause de terrorisme suscite beaucoup d’inquiétudes. Le terrorisme est considéré comme une infraction de droit commun, cependant, il renferme des spécificités qui doivent être prises en compte à tous les niveaux. Le législateur semble banaliser cette étape importante dans la répression du terrorisme.

Peu importe la nature de l’infraction, les droits procéduraux méritent d’être préservés. Aussi, les personnes interpellées dans le cadre des procédures de lutte contre le terrorisme ne méritent-elles le respect systématique de leurs droits, notamment le droit à la présomption d’innocence, et le droit à la défense ?

Les procédures dérogatoires témoignent de manière évidente. Elles pourraient se justifier par la nécessité de disposer de moyens adaptés et donc de méthodes plus contraignantes dans une optique d’efficacité renforcée. La dimension internationale du terrorisme nécessite également une réaction concertée des États africains par l’instauration de procédures de coopération internationale optimisée.

L’abandon du droit naturel permet au législateur malien de décider qui est une personne humaine et comment elle est suffisamment protégée ?

 

II. Méconnaissance ou insuffisance de protection des droits humains dans la réponse au terrorisme

Il s’agit en effet des excès de la procédure pénale dans sa réponse au terrorisme. Dans le préambule de la Constitution du 25 février 1992, le peuple malien a proclamé son attachement aux principes fondamentaux contenus dans la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 qui contient des standards internationaux d’équité du procès55.

La lutte contre le terrorisme, porte en elle des tensions entre des impératifs d’efficacité et des impératifs relatifs à la préservation des libertés individuelles. Ainsi, « pour enrayer une menace qui pèse sur les fondements mêmes du libéralisme, du pluralisme et de la démocratie ; les États sont à la recherche du juste équilibre entre la préservation des fondements de l’État de droit et l’efficacité de la prévention et de la répression »56. L’analyse de la nouvelle législation nous amène à relever des entorses au procès équitable et également la mise en berne de certains droits humains.

 

A. Les entorses à un procès équitable, un abus condamnable

Le droit à un procès équitable est, principalement, celui d’être informé des accusations et des preuves à charge, d’être jugé dans un délai raisonnable, d’accéder à un mécanisme de réexamen impartial, d’être indemnisé en cas de sanctions injustifiées portant atteinte aux droits fondamentaux et de connaître les motifs du jugement. Bien que les garanties procédurales varient selon que la procédure est de nature civile ou pénale, certains droits, découlant du principe de l’équité des procès, doivent être respectés dans tous les cas. Il en est ainsi de l’égalité devant les tribunaux, de la publicité du procès, de l’indépendance de la justice, de l’impartialité des juges, du droit à la défense, etc.57

Le droit à un procès équitable est un droit fondamental dans le système de la convention européenne des droits de l’homme58. Il englobe toute une série de garanties accordées au justiciable lorsqu’il est partie à un procès : « la présomption d’innocence, les droits de la défense, le droit à l’assistance d’un avocat, le droit à un recours effectif, à être jugé par un tribunal indépendant et impartial »59. Il est d’ailleurs solidement ancré dans le droit international de la protection des droits de l’homme, et solennellement reconnu par les principaux textes internationaux en la matière60.

Les garanties procédurales sont des avantages accordés au justiciable tout au long du procès pénal, qui sont les exigences processuelles d’un procès équitable entre société et délinquant, et le respect du sacrosaint principe de la présomption d’innocence.

 

1. Les exigences processuelles d’une mise en œuvre équitable entre société et délinquant 

Les règles protégeant les droits humains, doivent être appliquées à chaque niveau de traitement des affaires impliquant un cas de présumé terroriste, en vue d’offrir la garantie d’un procès équitable. En effet, « le processus relatif aux interpellations ou arrestations, aux poursuites, aux conditions de détention, aux enquêtes, à l’instruction, au jugement et à l’application des peines concernant des personnes présumées terroristes doit être placé sous le contrôle effectif du système judiciaire »61. Toute poursuite concernant des infractions de terrorisme doit être fondée sur une incrimination pénale légale préexistante. Pour toute condamnation prononcée on ne doit infliger que des peines prévues par la loi.

La Cour européenne des droits de l’homme, dans une affaire de lutte contre le terrorisme note ainsi les principes garantissant le procès équitable. C’est donc « face aux peines les plus lourdes que le droit à un procès équitable doit être assuré au plus haut degré possible par les sociétés démocratiques »62. Chaque personne a droit à un procès équitable offrant les garanties minimales qui consistent en l’existence d’un tribunal compétent, indépendant, et impartial et créé en vertu d’une loi, qui exerce son pouvoir équitablement et publiquement dans un délai raisonnable63. Cela est consacré par la constitution malienne.

Le respect des droits des personnes présumées auteurs ou soupçonnées de terrorisme comprend nécessairement l’observation des règles fondamentales garantissant un procès équitable. Ce principe est formulé dans la charte universelle des droits de l’homme64 et se retrouve dans le pacte international relatif aux droits civils et politiques65. Le droit de tout prévenu d’être défendu par un avocat, le droit de savoir le contenu de la poursuite et du dossier, et le principe du contradictoire sont quelques garanties essentielles de l’équité du procès, tous consacré dans la constitution malienne de 1992.

Dans le procès pénal, « l’avocat à un rôle essentiel à jouer, car c’est lui qui fournit l’aide juridique nécessaire face à la complexité des dispositions pénales en la matière »66. C’est lui le témoin vigilant de la régularité du procès. Il organise la défense du prévenu devant un tribunal. Les organisations internationales recommandent le respect des droits de la défense et des personnes, comme la déclaration universelle des droits de l’homme dont l’article 9 énonce : « Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu, ni exilé arrêté 67» et l’article 10 renchérit : « Toute personne a droit en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial… 68». La charte africaine dispose les mêmes dispositions en son article 769.

La Constitution malienne se montre elle aussi garante des droits de la défense. Ainsi, l’article 9 al. 4 de la Constitution du Mali affirme : « le droit de la défense y compris celui de se faire assister par l’avocat de son choix est garanti depuis l’enquête préliminaire70 ». Ce droit visé ici, équivaut dans l’esprit du constituant l’exercice du droit de la défense. Il est suivi de l’article 10 qui prescrit que « toute personne faisant l’objet d’une mesure privative de liberté a le droit de se faire examiner par un médecin de son choix »71. Cela se traduit par le fait que toute personne a le droit d’être représentée par un avocat de son choix, et par le fait que l’État est obligé de fournir une aide juridictionnelle gratuite à la personne en cause si, cette dernière n’est pas en mesure d’en bénéficier.

Par ailleurs, l’assistance d’un avocat pour les suspects arrêtés dans des zones éloignées et d’accès difficile est souvent impossible, l’aide judiciaire étant pratiquement inexistante, ceci constitue une difficulté majeure.

En matière de lutte contre le terrorisme, les droits de la défense sont mis à mal et cela commence à partir des arrestations et se poursuit avec les gardes à vue irrégulières et les détentions arbitraires. Ces faits aboutissent très généralement à des procès inéquitables. Les personnes soupçonnées d’actes terroristes voient souvent dans ce cas leur procès entaché d’irrégularités. A noter que les affaires de terrorisme dans la plupart des États africains sont toujours traitées par des tribunaux spéciaux.

Le droit de savoir et le droit à un débat contradictoire font également partie des principaux droits de la défense, considéré comme les composantes des droits à la défense. Le droit pour le suspect d’avoir connaissance du contenu de la poursuite et du dossier semble être couvert par le droit d’accès à un avocat dans la mesure où l’avocat désigné est contacté par la personne interpellée ou toute personne désignée.

Le droit de savoir est amplement reconnu à la personne mise en cause. Ainsi, dès l’enquête préliminaire et avant tout interrogatoire ou audition, l’officier de police judiciaire doit porter à la connaissance de l’intéressé son droit de se faire assister d’un avocat et mention en est fait au procès-verbal72. On peut constater à travers certaines dispositions que le législateur insiste sur le respect des droits de la défense aussi bien au niveau de l’enquête que de l’instruction.

Condition de droit à un procès équitable, la conduite des enquêtes doit être contradictoire et susceptible de préserver les droits des parties. Par ce principe, l’autorité judiciaire chargée de l’enquête doit à tout prix garantir aux justiciables le bénéfice d’un débat loyal au cours du jugement. Il est important de rappeler que pour l’équité du procès, le droit de participer à son propre procès est essentiel pour toute personne accusée dans une affaire.

Contrairement au stade de l’instruction, les procédures en phase de jugement ont un caractère accusatoire et se limitent à un affrontement contradictoire, oral et public. Le magistrat doit être en mesure d’appuyer son jugement sur les arguments invoqués au cours de la plaidoirie et discutés oralement, en présence des parties au procès. De même, « le droit de suggestion est au cœur même du contradictoire puisqu’il est celui de faire entendre sa voix, d’indiquer au juge ses moyens de défense »73. Elle est la personne accusée la mieux indiquée pour identifier des témoignages à charge et des éléments de preuve à contester. L’inculpé pourra demander une expertise, solliciter l’accomplissement d’actes particuliers. La contestation peut aussi porter sur la décision à travers l’exercice des voies de recours. Toutefois, il peut arriver que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, des procès par défaut soient autorisés. C’est le cas par exemple lorsque l’accusé, bien qu’informé du procès suffisamment à l’avance, refuse d’exercer son droit d’y être présent. Dans ce cas, toutes les mesures doivent être prises pour notifier à l’accusé les charges retenues contre lui, ainsi que la date et l’heure du procès.

Ces exigences se justifient par le droit au respect de la vie privée. La question demeure maintenant de savoir si l’on doit continuer à méconnaître dans le contexte de la lutte contre le terrorisme les droits et libertés fondamentaux des justiciables au nom de la sécurité. C’est dans ce sens que le respect à la loyauté procédurale est un défi pour tous les Etats de droit, y compris le Mali dans le cadre de cette lutte. Le respect des droits humains est indispensable à la crédibilité de la justice, malgré les enjeux sécuritaires de la lutte contre le terrorisme. 

L’une des difficultés essentielles du droit répressif est d’établir un équilibre entre les intérêts de la société et l’intérêt de la personne, afin d’aboutir à un procès équitable. Le régime répressif doit être déployé sous-tendu de principe directeur au rang desquels figurent le droit à la défense et la présomption d’innocence. Malgré leur caractère indispensable, ces deux principes semblent négligés en matière de lutte contre le terrorisme.

 

2. Le respect du sacrosaint principe de la présomption d’innocence, une valeur morale du procès

La présomption est une supposition fondée sur des signes de vraisemblance ou encore une anticipation sur ce qui n’est pas prouvé. Ainsi, « le droit à la présomption a donc pour objet ce type de vérités conjoncturelles »74. On retrouve la présomption dans plusieurs disciplines juridiques, il en sera question ici de la présomption d’innocence.

Le principe de la présomption d’innocence signifie que « la personne poursuivie ou simplement soupçonnée est innocente tant que sa culpabilité n’a pas été retenue par une décision de justice devenue irrévocable »75. La règle répond sans nul doute à un souci de justice. C’est une présomption légale, c’est-à-dire que, le raisonnement sur lequel elle repose est le fait de la loi et non du juge. C’est un principe incontournable du droit pénal qui repose sur des fondements textuels76. Chacun s’accorde à dire que la présomption d’innocence est un des fondements du droit pénal. Ce principe est également consolidé par sa consécration aussi par des textes nationaux77 et internationaux78 en raison des conséquences importantes qu’elle produit dans la protection des libertés individuelles. Dans ses dispositions préliminaires, le Code de procédure pénale énonce que « Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d’innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi »79. Il s’agit d’un principe général relatif à la répartition de la charge de la preuve.

La présomption d’innocence doit également être respectée au cours des procès terroristes. Le ministère public étant le demandeur à l’instance, il doit bien entendu prouver que la personne poursuivie est bien l’auteur des faits qu’il poursuit : actori incumbit probatio c’est-à-dire la preuve incombe au demandeur. Pour les infractions terroristes, c’est la partie poursuivante qui doit ramener la preuve de tous les éléments constitutifs de l’infraction. En cas de doute raisonnable, cela profite à la personne poursuivie. C’est un principe élémentaire de toute procédure que le juge ne peut, décider de la cause que suivant les preuves qui ont été réunies.

En mentionnant le respect de la présomption d’innocence dans la loi de 2001, le législateur malien ne s’est pas simplement contenté d’une affirmation générale en tête du Code de procédure pénale. Ces dispositions permettent au justiciable confronté à la justice répressive de faire respecter son droit à la présomption d’innocence.

En effet, ce droit subjectif existe tant au stade de l’enquête ou de l’instruction judiciaire, qu’à la suite d’une décision reconnaissant l’innocence de l’individu. Il y a lieu de préciser que si cette dernière décision devient définitive, la présomption d’innocence disparaît au profit de l’innocence pure et simple.

En matière de protection de présomption d’innocence, « le présumé innocent ne doit pas être diffamé, calomnié ou faire l’objet de publicité, si les preuves de sa culpabilité ne sont pas rapportées »80. Ainsi, qu’il soit suspect, prévenu, inculpé ou accusé, il devrait être traité normalement au même pied d’égalité qu’une personne qui n’est pas en procès, qui n’a rien à voir avec la justice. Elle ne doit donc pas être privée de sa liberté au cours du procès. Sur cette base, toute atteinte à sa réputation doit être sanctionnée. Toute décision visant à placer une personne en détention dans l’attente de son procès doit être conforme à ce principe. Au cours du procès, les juges doivent y veiller.

Au Mali, les suspects terroristes sont parfois détenus pendant de nombreux mois malgré l’absence tangible d’éléments de preuve. Le juge rencontre souvent des difficultés majeures pour instruire le dossier : il n’y a aucun élément de preuve qui puisse étayer les charges dans le dossier, pas d’élément matériel ni de témoignage qui soutiennent les motifs de l’arrestation, pas d’enquête de voisinage. Souvent, certains juges d’instruction n’hésitent pas par clémence à prendre des ordonnances de non-lieu pour insuffisance de preuves, respectant ainsi le principe de présomption d’innocence.

La présomption d’innocence impose le principe d’impartialité au juge lors des procès terroristes. L’impartialité s’analyse à partir de celui qui agit sans référence à un tiers. Ce principe conduit donc « à éviter que le juge ne succombe pas aux pressions et invitations des tiers, d’une part, qu’il ne fasse pas intervenir ses préjugés, convictions ou passions, d’autre part »81. Le juge ne doit donc pas avoir un penchant en faveur d’une des parties.

L’impartialité du juge est prescrite par l’article premier du Code de procédure pénale selon lequel la procédure pénale doit être équitable, contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties. Le législateur malien en matière de lutte contre le terrorisme crée une sorte de zizanie, d’une part ; les défenseurs des droits humains considèrent que les mesures adoptées sont non seulement liberticides, mais affaiblissent aussi les garanties d’un procès équitable, d’autre part. Les autorités considèrent que vu la gravité de la menace, il serait mieux de durcir la loi dans le souci d’amener un maximum de sécurité aux populations qui sont les plus exposées. C’est pour cette raison que le législateur a procédé à un réaménagement des textes82.

Il incombe aux magistrats de veiller au respect du principe de présomption d’innocence, pour qu’elle ne soit pas vidée de son contenu. Ils doivent protéger les droits et les libertés des individus et respecter les différents droits procéduraux prévus dans le droit national. Il a également été révélé dans la nouvelle législation malienne sur le terrorisme la mise en berne de certains droits humains.

 

B. La mise en berne de certains droits humains, un fait à corriger

Les mesures prises pour lutter contre le terrorisme ne sont pas toujours respectueuses des droits humains. Même si la lutte contre le terrorisme demande des mesures d’exception, ces mesures doivent respecter au mieux les droits humains. Mais on constate dans plusieurs législations de graves atteintes aux droits humains comme les atteintes au droit à la vie, les traitements inhumains et dégradants. Les droits humains sont des droits inhérents à la nature humaine, donc antérieurs et supérieurs à l’État. Ils sont le fondement de la liberté, de la justice, de la paix83. Leur respect permet à l’homme de s’épanouir. Raison pour laquelle, face à la lutte contre le phénomène terroriste, la question des droits humains s’est toujours posée, bien qu’il ait fallu attendre la conférence mondiale de Vienne du 14 au 24 juin 199384 pour que le lien existant soit établi. À la suite de cette conférence, il a été affirmé que les droits de l’homme sont universels, indivisibles, interdépendants et intimement liés. Les participants engageaient les États à promouvoir et à protéger l’ensemble des droits de l’homme pour tous, quel que soit leur système politique, économique et culturel85.

Malgré le fait que la convention d’Alger dispose « qu’aucune disposition de la présente convention ne peut être interprétée comme dérogatoire aux principes généraux du droit international humanitaire », les droits humains semblent ignorés dans les législations nationales mises en place pour lutter contre le terrorisme. La convention précise que dans la lutte contre le terrorisme, aucune mesure dérogatoire à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples ne doit être prise.

Pourtant dans la pratique des Etats, de nombreux comportements portant atteinte aux droits humains sont adoptés même s’ils ne sont pas inscrits officiellement dans les textes, ils sont, la plupart du temps, niés.

Les États, pour lutter contre le terrorisme passent le plus souvent par la torture, qui fait l’objet d’une condamnation universelle, même si aucun texte incriminant les actes terroristes n’y fait allusion. Le droit à la vie privée fait également objet d’atteintes graves dans la lutte contre le terrorisme. Il convient donc d’examiner deux de ces droits essentiels qui font l’objet d’atteintes sérieuses des personnes soupçonnées d’activités terroristes.

 

1. La notion de torture en matière de terrorisme 

Le terme « torture » désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite86. Ce terme ne s’étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles. Il s’agit de mauvais traitements humains qui interviendraient au cours des arrestations avant la remise aux autorités judiciaires officiellement des personnes arrêtées.

Ces actes ont été reconnus comme relevant des crimes graves, et leur interdiction comme norme fondamentale de la communauté internationale. La torture est un traitement ayant pour but d’obtenir des informations ou des aveux ou d’infliger une peine et c’est généralement une forme aggravée de traitement inhumain. Or, le droit à faire respecter l’intégrité physique et morale d’une personne est un droit absolu, qui fait partie du noyau dur des droits humains.

La convention des Nations unies du 10 décembre 1984 interdit la torture ou les peines ou traitements inhumains ou dégradants, quels que soient les agissements de la victime87. L’article 12 de cette convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants impose une obligation de procéder « immédiatement à une enquête impartiale » ; chaque fois qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un acte de torture a été commis. En référence à cette obligation, la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé que, malgré le silence de la convention européenne des droits de l’homme à cet égard, pareille exigence découle implicitement de la notion de « recours effectif », au sens de l’article 13 en matière de torture88. La Cour exige ainsi une enquête officielle effective, qui doit pouvoir mener à l’identification et à la punition des responsables puisqu’à défaut de telles investigations, l’interdiction générale de la torture et des peines ou traitement inhumain ou dégradant serait inefficace en pratique89. Ce droit ainsi garanti ne peut faire l’objet ni de limitations pour cause d’ordre public dans son exercice, ni même de dérogation. Donc, les Etats ne peuvent en suspendre la jouissance ou limiter son exercice pour cette cause de terrorisme. C’est un droit applicable à toute personne, en tous lieux et en tout temps.

Cette position de la Cour semble bien justifiée pour la défense de la cause d’une personne, même si en matière terroriste cela paraît complexe. Il est interdit de recourir à la torture90 et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants afin de soutirer des informations à des personnes soupçonnées de terrorisme91. Malheureusement, aujourd’hui les États font recours souvent à cette pratique pour combattre le terrorisme. La dignité humaine de la personne soupçonnée ou accusée ne doit pas être atteinte au nom de la lutte contre le terrorisme ; même si cette personne considérée comme ennemi ne respecte pas la dignité humaine des citoyens, victimes de ses attentats, puisque les normes internationales préconisent les droits humains.

La réponse de l’armée malienne à ce nouveau phénomène d’insécurité et de terrorisme dans le centre du Mali se serait quelquefois accompagnée de nombreuses violations des droits humains. La FIDH et l’AMDH ont documenté plusieurs cas de personnes ayant subi des tortures comme ce témoignage d’une victime : « Des militaires nous ont attaché les mains et les pieds et ont couvert nos visages. On ne voyait plus rien et on avait même du mal à respirer. Puis, ils nous ont emmenés dans la brousse. Ils nous ont frappés durant des heures, les coups pleuvaient. J’essayais de bouger pour me protéger, mais je n’y arrivais pas. Ils ont également brûlé du plastique qu’ils ont fait couler sur mon dos. Ils me demandaient si j’étais djihadiste, si je connaissais des djihadistes, et je leur répondais inlassablement que non, je cherchais uniquement du pain quotidien pour ma famille, mais ils n’entendaient pas »92. Ce témoignage est une preuve des atteintes aux droits humains en matière de lutte contre le terrorisme. Ces violations des droits humains sont causées contre des populations locales perçues comme étant affiliées au Front de libération de Macina.

Des exécutions sommaires ont également été mentionnées dans les rapports du groupe d’experts sur le Mali en 2018 et 201993. Les auteurs de ces exécutions sommaires auraient été suspendus, mais aucun d’entre eux n’aurait fait l’objet de condamnation. La violation des droits humains par les armées anéanties la confiance que les populations placent en elles dans la capacité à les protéger d’une part, et d’autre part cela peut pousser les populations à collaborer avec les groupes terroristes en échange de leur protection.

Malgré le caractère absolu de l’interdiction de la torture et autres traitement inhumains, certains Etats comme les Etats-Unis par exemple autorise à travers le Patriot Act. Cette loi autorise les policiers et les services de sécurité d’arrêter et retenir, des étrangers soupçonnés d’être en relation avec les groupes terroristes, pour une période indéterminée au nom de la lutte contre le terrorisme. Cette pratique est contraire aux principes de l’Etat de droit qui ne devraient pas être sacrifiés face à la violence utilisée par les terroristes, tel n’est pas le cas avec le Patriot Act.

Même si ces pratiques décriées au Mali ont paru mettre en cause l’interdiction absolue de la torture ou des traitements cruels, inhumains relativement à la lutte contre le terrorisme, force est de constater que le caractère intangible de ce droit a été réaffirmé par la Constitution et les instances internationales. L’interdiction de ces pratiques contre les présumés terroristes continue à constituer une limite aux pratiques de notre pays dans sa lutte contre le terrorisme. Il faut maintenant se pencher sur les défis relatifs au respect de la vie privée des présumés terroristes.

 

2. Les défis de respect de la vie privée des présumés terroristes et leurs proches 

La protection de la vie privée n’est pas assurée avec la lutte contre le terrorisme. Bien que la notion de vie privée constitue l’un des fondements de la société démocratique, il n’existe pas de véritable définition juridique du terme94.

Le droit à la vie privée, corollaire du droit à la vie, se trouve lui aussi mis à mal dans la lutte contre le terrorisme. Cette notion de vie privée constitue l’un des fondements de la société démocratique. Elle peut être comprise, faute de définition légale comme « cette partie de la vie qui n’est pas consacrée à une activité et/ou les tiers n’ont en principe pas accès; afin d’assurer à la personne le secret de la tranquillité à laquelle elle a le droit »95. Pourtant ce droit se trouve protégé par les textes internationaux. En effet l’article 17 du PIDCP interdit « aux États parties de porter atteinte à la vie privée des personnes relevant de leur compétence et les prie de protéger juridiquement ces personnes, contre les immixtions arbitraires ou illégales dans leur vie privée »96. C’est un droit qui ne souffre d’aucune dérogation.

Toute personne est protégée contre les intrusions des tierces personnes dans sa vie privée. Ainsi, « nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes »97. La vie privée renvoie à la liberté de mener des relations avec d’autres personnes sans ingérence extérieures. Tout risque d’atteinte à cette vie privée en la matière trouve son origine dans l’intervention de l’État qui cherche à se renseigner pour prévenir un danger et mieux organiser le fonctionnement de la cité ; donc les mécanismes de lutte contre le terrorisme constituant des ingérences dans la vie privée doivent être prévus par la loi et faire l’objet de contrôle juridictionnel.

Il ne fait pas de doute que cette pratique, d’ailleurs largement condamnée, viole le droit à la vie, qui est en effet un droit intangible ; absolu en cela qu’il n’est pas susceptible de dérogation ni de restriction qui seraient justifiées par la légitimité de l’objectif poursuivi par les autorités de l’État dans leur action meurtrière. En revanche, n’est absolument pas prohibé un certain usage meurtrier de la force. Ainsi, l’article 2 de la convention européenne des droits de l’homme ménage la possibilité d’un recours à la force (même meurtrier) « pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale »98. Partant, il peut être légitime pour des agents de l’État d’infliger la mort dans certaines circonstances strictement interprétées. Mais « l’article 2 ne leur donne cependant pas carte blanche. Le non-encadrement par des règles et l’abandon à l’arbitraire de l’action des agents de l’État sont incompatibles avec un respect effectif des droits de l’homme »99.

En vue d’anticiper tout risque de criminalité terroriste, certaines mesures ont été adoptées, des mesures d’intrusion dans la vie privée par les écoutes téléphoniques. On parle d’écoute téléphonique lorsque certains acteurs s’introduisent sur décision du juge d’instruction, dans les communications. Le régime de droit commun n’autorise pas que les conversations téléphoniques des particuliers soient écoutées, mais des exceptions sont possibles pour des situations liées à la sécurité nationale. Le législateur malien, en tenant compte de nombreuses évolutions technologiques a délibérément accepté de sacrifier certaines libertés pour pouvoir, semble-t-il, bien lutter contre le terrorisme.

L’utilisation de moyens de surveillance et d’interception de communications de plus en plus envahissants, suscite de graves préoccupations quant à la protection du droit à la vie privée100. Ces moyens d’interception des communications seront scrutés à la loupe par des agents à la recherche des infracteurs ; et c’est l’article 71 de la loi du 21 mai qui l’autorise : « Pour les besoins de l’enquête, les officiers de police judiciaire ; sur autorisation écrite du procureur de la République ou du juge d’instruction, agissant sur commission rogatoire, peuvent intercepter les communications téléphoniques ; les messages électroniques et autres courriers des suspects ou de toute autre personne en rapport avec eux »101. On constate à la lecture de cette disposition, que le législateur n’a pas daigné exiger une autorisation écrite d’une autorité judiciaire compétente pour les visites et perquisitions domiciliaires de nuit, mais elle a été prescrite pour les écoutes téléphoniques ; pour l’interception des correspondances ; comme si le principe de l’inviolabilité du domicile et celui des correspondances n’ont pas le même fondement juridique102 ; ou ne méritent pas les mêmes protections juridiques. Logiquement, il n’y a pas de cohérence entre le fait d’exiger de l’officier de police judiciaire une autorisation du procureur ou du juge d’instruction pour les écoutes téléphoniques, et l’absence de ces dispositions concernant les visites et perquisitions domiciliaires de nuit, surtout s’il existe des indices faisant présumer de la commission ou de la tentative de commission d’un acte terroriste.

Avec la loi de 2013, le législateur a conféré le monopole de la violence aux forces de l’ordre. Il a aussi rompu les garanties qu’ont les citoyens face aux pratiques arbitraires des pouvoirs publics, et le droit à la sécurité. Ces dispositions de surveillance policière ont des répercussions sur la vie privée des individus. C’est une immixtion non seulement dans la vie privée de la personne soupçonnée ; mais aussi celle de ses proches, de toutes les personnes entrées en contact avec elle à travers le téléphone ou par correspondance écrite. Par exemple les confidences d’un père à son fils, l’entretien d’un médecin avec son patient, peuvent être dévoilées. Des personnes envers qui il n’y a pas de soupçons découvriront que d’autres personnes (les agents) sont au courant de leurs échanges. Leur seul tort aura été d’avoir décroché l’appel téléphonique ou reçu un message électronique de la part de la personne mise sous surveillance.

Ce type de contrôle conduit à des dérives sécuritaires, car il faudrait vivre désormais avec le fait d’être dans une société où tout est sous contrôle au nom de la lutte contre le terrorisme. Le droit à la sécurité des personnes et des biens justifie des investigations policières très intrusives et restrictives dans la vie privée, des méthodes d’enquête et de recherche d’infraction au détriment des droits et libertés fondamentaux. Toutefois, afin de concilier les impératifs de lutte contre le terrorisme et le droit à la vie privée, le législateur conditionne et encadre. Nous trouvons, cet ensemble de dispositifs utile et judicieux, à condition qu’il serve à lutter efficacement contre le terrorisme ou la criminalité transfrontalière.

 

Conclusion

Face à des actes terroristes aussi condamnables au regard des principes démocratiques, les Etats africains, dans leur grande majorité sont face à un dilemme : doivent-ils exterminer les auteurs de tels actes en faisant abstraction des principes de l’Etat de droit ou au contraire, n’est-il pas plus judicieux de rester fidèles à ces principes dans leur lutte contre le terrorisme ? Les pays africains ont théoriquement choisi cette première solution dont le Mali. La réforme de la nouvelle législation malienne en matière de lutte contre le terrorisme a été réalisée dans un contexte global de lutte contre le terrorisme. Cette réforme heurte certains principes garantis par la constitution. Le choix du législateur correspond à un modèle qui semble conduire à ce qu’on dénomme « droit pénal de l’ennemi ». Cette évolution du droit pénal est présentée comme un régime dérogatoire au droit commun puisque les droits humains de l’individu ne sont plus reconnus car considérés comme ennemis de l’Etat. Ce qui nous a fait constater une dérive dans l’épanouissement de certains principes de droits humains.

Les principes de l’Etat de droit ne devraient pas être sacrifiés face à la violence utilisée par les terroristes, ils resteront les seuls moyens juridiques utilisés contre ces derniers, et les procédures et règles prévues par les textes constitutionnels, législatifs et réglementaires seront le cadre légal à partir duquel, ils seront jugés et punis si leur culpabilité est avérée. Si le terrorisme est un vrai danger pour les Etats, la mise en œuvre des mesures de lutte l’est tout autant, toutes choses qui conduisent à s’interroger sur les risques et dangers du blanchiment de capitaux.

1 Loi n° 08-025 du 23 juillet 2008 portant répression du terrorisme au Mali.

2 M. Masse, « La criminalité terroriste ». RSC, 2012, p. 89.

3 Loi n° 10.062 du 30 décembre 2010 relative à la lutte contre le financement du terrorisme.

4 Loi n° 2016-008 du 17 mars 2016 portant loi uniforme relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

5 Loi n° 2013-016 du 21 mai 2013 portant modification de la loi n° 01-080 du 20 août 2001 portant Code de procédure pénale du Mali.

6 Arrêt n° 88 du 15 février 2015, Ministère public v. Ousmane AHMAYED.

7 S. Fiore, « La construction de l’ennemi. La réforme de la récidive en Italie », in B. Laperou-Scheneider (dir.), Le nouveau droit de la récidive, Actes du colloque du 25 janvier 2007, Université de Franche-Comté, L’harmattan, 2008, p. 2.

8 Loi n° 08-025 du 23 juillet 2008, op. cit., p. 1-5.

9 Encore appelé convention d’Alger de 1999.

10 Art. 2 de la convention d’Alger.

11 M. Grawitz, Lexique des sciences sociales, Paris, Dalloz, 7e éd., 2000, p. 135.

12 O. Cahn, « Cet ennemi intérieur, nous devons le combattre. Le dispositif antiterroriste français, une manifestation du droit pénal de l’ennemi », Archives de politique criminelle 2016/1 (n° 38), p. 96.

13 Ibidem.

14 Au niveau des sanctions, les peines se sont alourdies (perpétuité, peine de mort) et la garde à vue peut aller jusqu’à 192 heures.

15 S. Aubert, « L’ennemi dans le livre IV du Code pénal français : approches comparées », Revue électronique de l’AIDP, 2012, A-02 :1.

16 Ibidem.

17 F. Edimo, « L’incrimination du terrorisme en droit pénal camerounais », Phd, Juridical Tribune, vol. 6, Issue 1, june 2016, p. 3.

18 P.G. Pougou, « Les figures de la sécurité juridique », Revue africaine des sciences juridiques, n° 1, vol. 4, 2007, p. 5.

19 L. C. Ambassa, Droit pénal général, augmenté des sujets traités, col. Leconnu, 1e éd., 2014, p. 80.

20 Art. 5 et 8 de la DDH de 1789, art. 11.2 et 22.2 de la DUDH de 1948.

21 Article 9 et s. de la Constitution du 25 février 1992 du Mali.

22 Julie Alix, Le terrorisme et le droit pénal. Etude critique des incriminations terroristes, Paris, 2010, p. 19.

23 Le terrorisme est un phénomène complexe. Le problème de sa définition demeure toujours d’actualité puisqu’il existe approximativement quelques 212 définitions du terrorisme à travers le monde.

24 Fabrice Roland Bikie, « Le droit pénal à l’aune du paradigme de l’ennemi. Réflexions sur l’Etat démocratique à l’épreuve de la loi camerounaise n° 2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme », Revue des droits de l’homme, 11/2017, n° 2, p. 5.

25 Ibidem.

26 Maurice Hauriou, Précis de droit administratif et droit public, Dalloz, 12e éd., 2002, p. 238.

27 André Akam-Akam, « Libres propos sur l’adage ‘’Nul n’est censé ignorer la loi’’ », RAS-J, Yaoundé II, vol. 4, n° 1, 2007, p. 51.

28 Article 4 al. 1 de la loi de 2008 portant répression du terrorisme.

29 Le principe est contenu dans les articles 5 et 8 de la déclaration des droits de l’homme de 1948.

30 La Constitution du 25 février 1992 dispose dans son article 9 que : « Nul ne peut être poursuivi ; arrêté ou inculpé qu’en vertu d’une loi promulguée antérieurement aux faits qui lui sont reprochés ».

31 L’affaire de Tarmac est illustrative htpp://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/08/10/la-menace-terrorits-et-les-lecon-de-tarnac-4719689-1653578.html, consulté le 22 juin 2018.

32 Romane Nouzieres, La conciliation entre la lutte pénale contre le terrorisme et le respect des droits fondamentaux, mémoire de maîtrise, Laval, Québec, 2017, p. 5.

33 Catherine MARIE, « La montée en puissance de l’enquête ». A.J. pénal 2004, p. 221.

34 Hélène Cisse et Allan Ngari, Garantir un procès équitable aux présumés terroristes au Mali, Rapport, Institut d’Etudes de sécurité (ISS), 2019, p. 10.

35 Boubacar Badiaga, « Le présumé innocent face à la justice et à la presse au Mali, Bamako (Mali) », La sahélienne, 2015, p. 79.

36 Julie Alix, op. cit., p. 376.

37 Yves Mayaud, Le terrorisme, Paris 1997, p. 91.

38 Loi n° 01-080 du 20 août 2001, art. 76.

39 Loi n° 2007-01 du 12 février 2007 portant Code pénal du Sénégal.

40 CPP, art. 677-28 issu de la loi de 2016-30 du Sénégal, précitée : « Par dérogation aux dispositions de l’article 55 du présent Code, le délai de garde à vue en matière de terrorisme est de quatre-vingt-seize heures. Ce délai peut être prorogé de deux nouveaux délais de quatre-vingt-seize heures chacun, sur autorisation du juge d’instruction ou du procureur de la République si le juge d’instruction n’est pas encore saisi ».

41 La déclaration conjointe d’Amnesty International (Al Section Sénégal) et la Ligue sénégalaise des droits de l’homme (LSDH). Cette déclaration est disponible sur le lien suivant : http : // www.pressafrik.com/Amnesty-international-et-LSDH-plaident-contre-la-loi-sur-le-terrorisme-et-la-cybercriminalité_al58082.html.

42 Selon l’article 706-88-1 du Code de procédure pénale français, la durée est de six jours.

43 Loi n° 2013-016 du 21 mai 2013, op. cit., art. 7 al. 2.

44 Julie Alix, Terrorisme et droit pénal, Etude des incriminations terroristes, op. cit., p. 376.

45 Sébastian Pelle, Le terrorisme : nouveaux enjeux, nouvelles stratégies. Actes de colloque du 25 novembre 2016, Aspects juridiques et criminologiques, p. 36.

46 Ibidem, p. 37.

47 Abderrafia Mnaouri, Approche comparée de l’appareil législatif franco-marocain en matière de lutte contre le terrorisme, thèse, droit, Perpignan, 2015, p. 522.

48 Constitution malienne de 1992, art. 6.

49 Lassina Diarra, La CEDEAO face au terrorisme transnational, L’harmattan, 2016, p. 102.

50 Loi n° 2013-016 du 21 mai 2013, op. cit., art. 7 al. 1.

51 Jean-François Flauss, « Le délai raisonnable au sens des articles 5 § 3 et 6 § 1 de la convention européenne des droits de l’homme dans la jurisprudence française », RTDH, 1991, p. 3.

52 Constitution du Mali de 1992, art. 6.

53 Ibidem, art. 4.

54 Ibidem, art. 9.

55 Articles 8 à 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.

56 Oriane Ben Attar, « Les modalités actuelles de la lutte contre le terrorisme dans les Etats européens », Civitas Europa, 2015/1 n° 34, p. 169-190, p. 170.

57 La lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel : Cadre juridique, techniques d’enquête et coopération policière, Module de formation à l’attention des officiers de police judiciaire (OPJ), ONUDC, 2012, p. 67.

58 Article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

59 Justine Vaesen, L’Etat français face aux crimes terroristes : vers une normalisation de l’état d’exception ? Analyse de l’état d’urgence à la lumière de l’œuvre de Carl Schmitt, Master en droit, Liège, 2017, p. 25.

60 Article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.

61 Hélène Cisse et Allan Ngari, op. cit., p. 9.

62 CEDH, 27 nov. 2008, Salduz c/ Turquie, § 54.

63 Réseau d’observation de la justice, Lutte contre le terrorisme et pratique judiciaire en Tunisie, le procès équitable à l’épreuve, décembre 2016.

64 Adoptée et proclamée par l’Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948, art. 10.

65 Signé à New York le 19 décembre 1966 (procès équitable : art 9 et 14, par. 1).

66 Athanasia Petropoulou, Liberté et sécurité : les mesures antiterroristes et la Cour européenne des droits de l’homme, Pedone, 2014, p. 207.

67 Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, art. 9.

68 Ibidem, art. 10.

69 Article 7 de la charte africaine : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend : // a / le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et coutumes en vigueur ; b / le droit à la présomption d'innocence, jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente ; c / le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ; d / le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale 2. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constituait pas, au moment où elle a eu lieu, une infraction légalement punissable. Aucune peine ne peut être infligée si elle n'a pas été prévue au moment où l'infraction a été commise. La peine est personnelle et ne peut frapper que le délinquant ».

70 Constitution malienne de 1992, op. cit., art. 9 al. 4.

71 Ibidem, art. 10.

72 Code de procédure pénale malien de 2001, art. 76 in fine.

73 Malick Coulibaly, La procédure pénale au Mali, Bamako, Edition Jamana, 2009, p. 129.

74 Hervé Magloire Moneboulou Minkada, « La crise de la présomption d’innocence : regard croisé sur la procédure pénale camerounaise et de la Cour pénale internationale », Tribuna Juridica, vol. 4, 2014, p. 69-103, p. 70.

75 Malick Coulibaly, La procédure pénale au Mali, op. cit. p. 120.

76 La Constitution du 25 février 1992 dispose en son article 9 al. 3 que « tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par la juridiction compétente », et le Code pénal dans ses dispositions préliminaires énonce que « toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie », donc les atteintes sont prévenues, réprimées et réparées dans les conditions prévues par la loi.

77 Constitution malienne de 1992, art. 9 al. 3.

78 Voir l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 ; l’article 11-1 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 qui dispose que « toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public ou toutes les garanties nécessaires à sa défense auront été assurée » ; l’article 14 du Pacte international sur les droits civils et politiques prescrit que « toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie » ; l’article 7-b de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 28 juin 1981.

79 Loi portant Code de procédure pénale du Mali, art. 2.

80 Hervé Magloire Moneboulou Minkada, op. cit., p. 80.

81 Malick Coulibaly, op. cit., p. 122.

82 Adoption de la loi de 2008 sur la répression et celle de 2013.

83 Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, 1er considérant du préambule.

84 Déclaration et programme d’action de Vienne, adoptés par la conférence mondiale sur les droits de l’homme le 25 juin 1993.

85 Ibidem p. 11.

86 Code pénal du Mali de 2001, art. 209.

87 Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants adoptée le 10 décembre 1984.

88 CEDH, 7 juill. 1989, Soering c/ Royaume-Uni, cité supra n° 18, § 88 ; CEDH, 18 déc. 1996, Aksoy c/ Turquie, cité supra n° 11, § 98.

89 CEDH, 20 mai 2008, Tekin et a. c/ Turquie, § 59.

90 Carolina Cerda-Guzman, « Le recours à la torture par les Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme » in La place des libertés face à la lutte contre le terrorisme, tables rondes organisées par le CREDOF en partenariat avec la ligue des droits de l’homme. Section-Université Nanterre le 18 juin 2015, p. 38 et s.

91 Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants, op. cit., art. 5.

92 FIDH, AMDH, Mali, Terrorisme et impunité font chanceler un accord de paix fragile, Note de position conjointe, mai 2017, n° 692f.

93 Rapport 2018 du groupe d’experts sur le Mali, (S/2018/581-1174). Les exactions sommaires intervenues entre février et juin 2018 ont eu lieu notamment dans le village de Sokolo (Région de Ségou) et à Boulkessi et Nantaka (Région de Mopti) (Rapport 2019 S/2019/636).

94 La notion de vie privée est construite sur la dichotomie entre vie privée et vie publique, permettant l’approfondissement d’une certaine idée de la liberté des individus selon leur personnalité, liberté qui est le point d’ancrage à partir duquel se produit la critique du totalitarisme des pays collectivistes. Pour plus de précision sur la question, Voir Monica Zwolinska, Sécurité et libertés fondamentales des communications électroniques en droit français, européen et international, thèse, Université Nice Sophia Antipolis, 2015, p. 96 et s.

95 André Roux, La protection de la vie privée dans les rapports entre l’Etat et les particuliers, Presses universitaires d’Aix Marseille, 1983, p. 279.

96 Art. 17 du pacte international aux droits civils et politiques de 1966.

97 Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 déc. 1948, art. 12 ; Convention européenne des droits de l’homme, art. 8 et ses protocoles 1, 4, 6 et 7.

98 Cette disposition ne déroge pas au régime universel des droits de l’homme et, pour le comité des droits de l’homme; l’article 6 du PIDCP impose aussi de « réglementer et limiter strictement les cas dans lesquels une personne peut être privée de la vie par ces autorités ». Obs. générale, n° 6, § 3.

99 CEDH, 26 févr. 2008, Mansuroglu c/ Turquie, § 72.

100 Déclaration des droits de l’homme, de la dignité humaine et de la société de l’information, Revue québécoise de droit international 18.1, 2005, p. 5.

101 Code de procédure pénale de 2013, art. 71 al. 3.

102 Constitution du 25 février de 1992, art. 6.

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Facteurs de risque et impacts sociosanitaires de la violence faite aux enfants en milieu urbain à Dalao

Gniondjibohoui Marc Ounnebo, Enseignant-Chercheur, Ufr Sciences Sociales Et Humaines, Département De Sociologie-Anthropologie, Université Jean Lorougnon Guédé, Daloa, Côte D'ivoire

La violence faite aux enfants en Côte d’Ivoire, en général, et particulièrement à Daloa constitue un problème de santé publique aux conséquences potentiellement dommageables pour les enfants victimes. En dépit des initiatives prises par les autorités pour y mettre fin, ce phénomène continue de progresser. Cette situation mérite une attention particulière. La présente étude se propose d’analyser les facteurs de risque et les impacts socio-sanitaires de la violence faite aux enfants en milieu urbain à Daloa. Elle s’inscrit dans une...

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