Face à une crise sanitaire sans précédent, l’enjeu que représentent les synergies mobilisées par les gouvernements des différents pays touchés par la pandémie, le Maroc en particulier, était d’assurer le juste équilibre entre d’une part la protection de la santé1 publique qui est un élément fondamental des droits de l’homme universellement reconnus, d’autre part le respect des droits de l’homme dans tous les domaines, y compris les droits économiques, sociaux, civils et politiques… En l’absence d’une solution internationale, le royaume n’a pas ménagé ses efforts, à la suite des instructions du roi, en instaurant l’état d’urgence sanitaire, le 19 mars 2020, afin de juguler la propagation de cette pandémie généralisée de la Covid-19.
Ces efforts d’atténuation, puis d’endiguement ont résulté d’une réflexion approfondie et d’une approche anticipative. Ils ont permis au Maroc de devenir une sorte de référence pour le reste du monde, en sacrifiant l’économie pour préserver la santé de la population, voire la vie des citoyens2. Lors de son entrée en vigueur, le lendemain de sa proclamation par un communiqué du ministère de l’Intérieur, en application du décret-loi du 19 mars, l’état d’urgence sanitaire est devenu une nécessité et une mesure inévitable qui habilite le pouvoir exécutif à développer les outils législatifs nécessaires et proportionnés, notamment par le biais de décrets, pour répondre à la pandémie.
Au Maroc, l’état d’urgence sanitaire est une forme de restriction juridique inhabituelle dans un pays stable. Elle se distingue des deux mesures restrictives prévues par la Constitution marocaine du 1er juillet 20113, à savoir l’état de siège et l’état d’exception, en raison d’une part des risques liés à la Covid-19, et d’autre part du fait des dispositions législatives imprévues adoptées et adaptées au contexte pandémique et aux circonstances de l’évolution du virus.
Dans un contexte juridique renforcé et mieux adapté aux circonstances du royaume, le volet pénal des mesures adoptées par le gouvernement marocain a été instauré par le décret-loi n° 2-20-2924, portant promulgation des dispositions relatives à l’état d’urgence sanitaire et aux procédures de sa déclaration pour faire face à la Covid-19, et par ceux qui seront décidés plus tard. Le décret-loi d’une part institue une infraction propre et spécifique à l’état d’urgence sanitaire (qualifiée de délit) et d’autre part comporte des peines privatives de liberté (emprisonnement), des sanctions pécuniaires (amende), sans préjudice de sanctions pénales plus lourdes. Il détermine également les attributions des autorités chargées de constater et de réprimer toute transgression des mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire liée à la Covid-19, ainsi que la suspension de tous les délais légaux et réglementaires en vigueur, pendant toute la durée de l'état d'urgence5.
Ce faisant, le contexte de l’état d’urgence sanitaire a une influence sur la politique pénale, faisant surgir des questions juridiques nouvelles et épineuses qui portent sur les garanties d’un bon équilibre entre le caractère impérieux du principe de légalité et la sauvegarde des libertés et droits fondamentaux de l’homme, tout cela en conformité avec la sécurité sanitaire imposée par la Covid-19. À situation exceptionnelle, débat exceptionnel, car si c’est seulement par injonction normative que l’état d’urgence sanitaire, complétement inattendu, peut être normalisé pour assurer la pérennité d’un régime d’exception législatif, la légalité des mesures exceptionnelles instaurées par le pouvoir exécutif soulève des interrogations doctrinales portant sur l’existence d’une justice d’exception.
Cette objection n’avait, jusqu’aujourd’hui, jamais été envisagée par la doctrine, notamment marocaine, en matière de politique pénale en temps de crise sanitaire. Il faut à présent mener une réflexion constructive appropriée, en décrivant les caractéristiques théoriques et pratiques de l’approche juridique de l’état d’urgence sanitaire (I) et de l’activité judiciaire dans ce contexte (II)
I. L’encadrement législatif de l’état d’urgence sanitaire
Deux décrets-lois ont jeté les bases de l’état d’urgence sanitaire (A), avec un accompagnement social promu par le Comité de veille sanitaire (B) et dans le respect de la légalité pénale en matière d’incrimination et de sanctions (C).
A. Les décrets-lois sur l’état d’urgence sanitaire
En l’absence de Code de la santé publique, le législateur marocain n’a prévu aucune disposition légale à propos de l’existence d’un état d’urgence d’ordre sanitaire au niveau national. Ce vide législatif résulte du caractère inédit et imprévu de la pandémie de la Covid-19, qui constitue un risque sanitaire et une menace pour la santé publique. Par ailleurs, les risques qui menacent la souveraineté de l’État, le fonctionnement normal des institutions constitutionnelles et l’ordre public, entraînent d’autres formes d’état d’urgence prévues par la Constitution marocaine de 2011, telles que l’état de siège et l’état d’exception. L’état d’urgence sanitaire a été instauré au Maroc par une mesure législative adaptée au risque sanitaire de la Covid-19, afin d’assurer la sécurité des populations et du territoire national, dans le respect des libertés et des droits fondamentaux garantis à tous (Bigo et Guittet, 2004, 203).
En application des dispositions de la loi suprême dans le cadre des mesures préventives prises pour faire face à la crise de la Codiv-19, le Maroc s’est conformé à ses engagements souscrits en droit international et réaffirme son attachement au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Ces dispositions résultent des articles 216 et 24 alinéa 47 de la Constitution marocaine de 2011, et en particulier de l’article 818 qui permet au gouvernement dans l’intervalle des sessions parlementaires, avec l’accord des commissions concernées des deux chambres, d’adopter des décrets lois qui doivent être, au cours de la session ordinaire suivante du Parlement, soumis à la ratification de celui-ci.
Effectivement, après avoir été présenté et validé en conseil de gouvernement le dimanche 22 mars, puis approuvé à l’unanimité par les députés membres des commissions de l’Intérieur des deux Chambres du Parlement (Chambre des représentants et Chambre des conseillers), le gouvernement marocain a adopté officiellement, le 24 mars 2020, le décret-loi n° 2-20-2929. Ce nouvel instrument juridique, promulgué le 24 mars, est adapté à l’état d’urgence sanitaire et aux procédures de sa déclaration par l’autorité compétente. Il détermine également le cadre législatif des mesures préventives prises pour limiter la propagation de la Covid-19.
Aussitôt, sur proposition conjointe des ministres de l’Intérieur et de la Santé, le gouvernement marocain a proclamé officiellement l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire marocain par un second décret-loi n° 2-20-29310, avec une possibilité de prorogation. Le régime de prolongation constitue une issue et une garantie juridique, octroyant aux autorités la possibilité de prendre toutes les mesures exceptionnelles nécessaires, pour faire face à toute évolution éventuelle de la pandémie.
Aux termes de l’article 2 du décret-loi n° 2.20.292, plusieurs décrets-lois ont été adoptés par le gouvernement marocain, permettant la reconduction de la période de validité de l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire marocain, à savoir :
-le décret-loi n° 2.20.371 portant reconduction de l’état d’urgence du 20 mai 2020, Bulletin officiel n° 6883 bis du 19 mai,
-le décret-loi n° 2.20.406, portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 juin 2020 au 10 juillet, avec un allègement progressif des mesures du confinement qui prend en considération les différences de la situation épidémiologique entre les régions, préfectures et provinces du royaume, Bulletin officiel n° 6889 bis du 9 juin 2020,
-le décret-loi n° 2.20.426 portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 juillet 2020 au 10 août 2020, Bulletin officiel n° 6898 bis du 9 juillet 2020,
-le décret-loi n° 2.20.526, portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 août au 10 septembre 2020, Bulletin officiel n° 6906 bis du 8 août 2020,
-le décret n° 2.20.631, portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 septembre au 10 octobre 2020, Bulletin officiel n° 6915 bis du 9 septembre 2020,
-le décret-loi n° 2.20.711, portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 octobre au 10 novembre 2020, Bulletin officiel n° 6924 du 8 octobre 2020,
-le décret-loi n° 2.20.788, portant reconduction de l’état d’urgence sanitaire du 10 novembre au 10 décembre 2020,
-le décret-loi n° 2.20.882, portant reconduction de l’état d’urgence du 10 décembre au 10 janvier 2021,
-le décret-loi n° 2.20.960, portant reconduction de l’état d’urgence du 10 janvier au 10 février 2021.
En application du premier article du décret-loi n° 2-20-292, les autorités sont autorisées à prendre toutes les mesures utiles et nécessaires et également à déclarer l’état d’urgence sanitaire dans n’importe quelle région, préfecture, province ou commune, ainsi que sur l’ensemble du territoire national en cas de besoin, et cela chaque fois que la sécurité sanitaire des personnes est menacée par une épidémie ou une maladie contagieuse.
Ces mesures d’exception, énumérées dans l’article 3 du décret-loi n° 2-20-29311 organisant l’état d’urgence sanitaire, peuvent être prises par des décrets, par des décisions administratives, par des circulaires ou encore par voie de communiqués, sur le fondement de l’article 3 du décret-loi n° 2-20-292. Il renforce les pouvoirs du gouvernement, en vue de restreindre certaines libertés collectives ou individuelles pour limiter les risques qui menacent la santé publique.
L’état d’urgence sanitaire a démarré par des mesures exceptionnelles pour limiter les déplacements des citoyens, dans un premier temps par un confinement général et obligatoire de la population et par la fermeture forcée des lieux recevant du public non indispensables à la vie quotidienne, puis par la déclaration de certaines mesures de distanciation sociale et par la création d’un fonds social Covid-19… Il a suscité dans un second temps une importante production législative pour période exceptionnelle, qui concerne la plupart des domaines de nécessité courante de la vie des citoyens, sur les plans économique, éducatif, social, culturel, sportif, artistique, politique… et particulièrement des dispositions liées à l’activité pénale en apportant à l’exercice des libertés des restrictions indispensables, pendant la durée limitée du confinement des citoyens.
B. Le Comité de veille sanitaire
Pour mieux réussir et accompagner ces mesures d’ordre exceptionnel, le Maroc a créé un Comité de veille économique, dont la première réunion s’est tenue le 16 mars 2020, pour atténuer les effets de la crise de la Covid-19 à la lumière des contraintes constatées et des indicateurs conjoncturels, sur les plans économique, fiscal et social. Ces mesures proposées par le Comité de veille économique pour anticiper les répercussions économiques directes et indirectes de la crise sanitaire de la Covid-19 sur l’économie nationale, seront financées par le Fonds spécial mobilisé pour la gestion de la pandémie de la Covid-19, et font l’objet de conventions entre le gouvernement et les établissements concernés : CNSS12, CGEM13…
Parmi les premières mesures spécifiques annoncées par le Comité de veille économique, il y a celles accordées au profit des salariés déclarés à la CNSS à fin février 2020, appartenant à une société en difficulté ou en arrêt d’activité : ils bénéficieront d’une indemnité forfaitaire mensuelle d’un montant de 2 000 dirhams net. Elle sera versée à cette catégorie d’employés, en plus des allocations familiales et des prestations de l’assurance maladie obligatoire14. Le secteur bancaire a été avisé de cette première série de mesures et de l’adoption d’un moratoire qui accorde à tous leurs clients (particuliers, entreprises) qui le demandent par écrit, le report du règlement des échéances amortissables (crédits immobiliers et crédits à la consommation), pour une période de trois mois, renouvelable une fois.
Sur le plan fiscal, le Comité de veille économique a instauré deux mesures phares lors de cette réunion. Elles concernent les entreprises dont le chiffre d’affaires de l’exercice 2019 est inférieur à 20 millions de dirhams. Celles-ci pourront, si elles le souhaitent, bénéficier d’un report du dépôt des déclarations fiscales jusqu’au 30 juin 2020. S’y ajoute la suspension des contrôles fiscaux et des avis à tiers détenteur15 jusqu’à la même date, sous réserve de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire. La panoplie des efforts déployés par le royaume, dans tous les domaines de la vie normale des citoyens, n’a pas cessé de se diversifier pour garantir l’efficience et l’efficacité des mesures prises pour contrecarrer la propagation de la Covid-19, qui gagne du terrain du jour en jour.
Malgré les efforts réalisés, après plus de deux mois de confinement général de la population, le prolongement de l’état d’urgence sanitaire devient une évidence et une nécessité pour que le gouvernement marocain puisse maîtriser au mieux l’évolution de cette pandémie. En effet, par les dispositions de l’article 2 du décret-loi n° 2-20-292, l’état d’urgence sanitaire a été prolongé sur l’ensemble du territoire marocain par décret n° 2-20-330, sur proposition du ministre de l’Intérieur pour un mois jusqu’au 20 mai, afin de poursuivre l’application des mesures prises depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire dont celles de la mise en quarantaine de la population, sans préjudice d’une autre prorogation, selon l’évolution du contexte pandémique.
C. La légalité pénale de l’incrimination et des sanctions
Pour ce qui est du Maroc, trois possibilités vraisemblables qui ont constitué le sujet de débats doctrinaux, peuvent être avancées pour affirmer la légalité pénale des sanctions relatives aux manquements à ces mesures exceptionnelles, en l’absence de tout dispositif juridique vraiment adapté à la situation d’urgence sanitaire au moment de la survenue de la Covid-19.
Tout d’abord, le décret royal n° 554-65 du 26 juin 196716, portant loi rendant obligatoire la déclaration de certaines maladies et prescrivant des mesures prophylactiques propres à enrayer ces maladies, et donc l’article 6 sanctionne la non déclaration par les professionnels de santé, de toute constatation ou suspicion d’existence de cas de maladies qui risquent de menacer la santé publique17.
Pour autant, ce décret royal concerne uniquement les professionnels de santé et non pas le citoyen ordinaire, et toute tentative d’élargir son champs d’application, en cas de non déclaration par le citoyen ordinaire, sera considérée comme une extension de l'interprétation restrictive et stricte du texte pénal, corollaire de la légalité pénale, ce qui est incompatible avec le respect du principe de légalité pénale.
La seconde approche considérait que toute violation des mesures impliquées par la décision d’état d'urgence sanitaire et annoncées par le ministre de l’Intérieur le 19 mars, peut être qualifiée de délit de rébellion et relever de l’article 308 du Code pénal marocain. Ce texte rend passible d’une privation de liberté de deux à six mois et d'une amende d'au moins deux cents dirhams et au maximum d'un quart du montant de l'indemnisation, toute personne qui s'oppose par des voies de faits à l'exécution de travaux commandés ou autorisés par l'autorité publique. Par comparaison : si l’opposition se manifeste par des attroupements, des menaces ou des violences, la sanction s’élève à un emprisonnement de trois mois à deux ans, tout en gardant le même montant d’amende18.
Néanmoins, cette approche est en contradiction avec l’interprétation adoptée par le législateur marocain à propos de l’infraction de rébellion. Ainsi, l’article 300 du Code pénal marocain qualifie l'attaque ou la résistance, par la violence, voire simplement des menaces contre des fonctionnaires ou des représentants de l'autorité publique, dans le cadre de leurs fonctions édictées par un ordre de la loi, comme étant un acte de rébellion19. Par ailleurs, la décision qui ordonne le confinement et la mise en quarantaine de la population ne peut être qualifiée de travaux ordonnés par l’autorité publique, d’autant plus que la violation des mesures anticipatives pour limiter et contourner la propagation de la Covid-19, n’entraîne pas forcément de violence, ni d’agression contre les forces de l’ordre qui veillent sur l’application de l’état d’urgence.
La troisième approche est celle qui se fonde sur l’application de l’article 609 du Code pénal. Ce dernier sanctionne d’une amende à caractère dérisoire de 10 à 120 dirhams, tout acte qui enfreint légalement les décrets et les arrêtés pris par l'autorité administrative lorsque les infractions à ces textes ne sont pas réprimées par des dispositions spéciales. C’était le cas de la décision du ministre de l’Intérieur, le 19 mars, avant la promulgation le 24 mars du décret-loi n° 2-20-292 relatif à l’état d’urgence sanitaire au Maroc.
De surcroît, selon cette optique, la décision anticipée du 19 mars relative à l'état d'urgence sanitaire était juridiquement considérée comme une décision administrative rendue par une autorité administrative, en l’occurrence le ministre de l'Intérieur sur proposition du ministre de la Santé. Cette décision du 19 mars ne prévoyait aucun interdit qui puisse être qualifié de délit, ni aucune sanction liée à sa violation.
Cela signifie que la violation de la décision d'urgence sanitaire est considérée comme une simple violation et est passible d'une sanction pécuniaire, ce qui correspond aux sanctions mises en place par de nombreux pays, à l’encontre de toute violation des décisions de mise en quarantaine totale de la population pour lutter contre la Covid-19. De plus, le montant dérisoire de l’amende proposée par l’article 6-11°, de 10 à 120 dirhams, laisse à désirer et peut engendrer le non-respect des mesures d’anticipation prises suite à la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, le 19 mars, par les autorités publiques pour préserver la santé publique.
Cela remet en question une fois de plus l’adoption de cette troisième hypothèse, malgré son adhésion au principe de légalité pénale. Dès lors, les gouvernements aussi bien marocain que français, n’ont pas tardé à adapter leur système juridique à cette situation de crise sanitaire, en promulguant respectivement le décret-loi n° 2-20-292 du 24 mars édictant des mesures spécifiques à l'état d'urgence sanitaire et les procédures de son application, et la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 prise en urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. Ces textes de loi ont mis fin au problème de la légalité pénale en temps d’état d’urgence sanitaire par une proclamation officielle, des incriminations et des sanctions spécifiques dans des circonstances de crise appropriées à la crise sanitaire de la Covid-19.
II. Organisation et exercice de la justice pénale confrontée à la covid 19
Le covid 19 a conduit la justice pénale à adapter les audiences (A), à accorder des moratoires et des allègements des délais processuels (B) et à aménagement les mesures de privation de liberté et d’exécution des peines (C).
A. L’adaptation des audiences
L’organisation du fonctionnement des juridictions répressives a été profondément bousculée. Au Maroc, un système de présence rotative a été adopté par les autorités judiciaires, conformément à la circulaire n° 01 du 16 mars 2020 du ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’administration. Dans le cadre d’une stratégie de dématérialisation des actes judiciaires, le droit français est préfigurateur puisque tous les dépôts de plaintes, les recours, les demandes formées auprès des magistrats ou tous autres actes judiciaires nécessitant le déplacement pour un enregistrement auprès des services de greffes, peuvent être faits exceptionnellement, soit par courrier recommandé avec accusé de réception, soit par courrier électronique, ces derniers faisant systématiquement l’objet d’un accusé électronique de lecture par la juridiction20.
Le Maroc a adhéré, fût-ce temporairement à cause de l’état d’urgence sanitaire provoquée par la propagation de la Covid-19, à cette initiative de digitalisation des actes judiciaires pour épargner les flux de déplacement des usagers auprès des juridictions répressives. Ainsi, la présidence du ministère public a-t-elle appelé les justiciables à éviter tout dépôt direct d’acte judicaire, en mettant tous les moyens logistiques et humains pour faciliter les actes judiciaires à distance. De même, les dépôts de plaintes, auprès des procureurs généraux du roi près les Cours d’appel et des procureurs du roi près les tribunaux de première instance, peuvent se faire par fax ou e-mail : à l’adresse plaintes@pmp.ma, ou via le site web du ministère public : www.pmp.ma21. Ces modalités de dépôts provoquent un accusé réception d’office.
En cas d’urgence, y compris pour la dénonciation d’infractions par les citoyens, des plateformes téléphoniques et des lignes vertes directes, ont été mises en place pour permettre aux avocats et aux justiciables de demander toutes informations ou indications nécessaires pour le procès pénal.
La tenue des audiences pénales a, quant à elle, été suspendue au Maroc22 depuis le début du confinement, à l’exception des audiences qui concernent les affaires impliquant des personnes poursuivies en état de détention provisoire, et celles qui portent sur des dossiers en référé, de comparution immédiate, ou à des dossiers d'instruction. Ainsi, la publicité des audiences peut-elle être restreinte avec huis clos, à l’exception des journalistes qui pourront assister à certaines audiences qui intéressent l’opinion publique23.
. Afin d’adapter les audiences au contexte in situ du confinement, et en l’absence de toutes précisions législatives facilitant la mise en œuvre digitale des audiences à distance, de la mise en état ou des plaidoiries, tant pour la justice de fond qu’en référé, les juridictions répressives marocaines ont fait appel au numérique, fondé sur la circulaire des autorités de tutelle24 dans un contexte de pandémie et en préservant les droits de la défense et le principe du contradictoire25. Dans l’attente de l’officialisation du projet concernant l’usage des supports électroniques dans les procédures judiciaires, les juridictions répressives marocaines ont assuré 12 248 audiences entre fin avril et le 25 décembre, avec la programmation de 227 214 affaires26.
La Cour de cassation marocaine a donné l’exemple par la tenue de sa première visioconférence avec une audience à distance27, le 6 mai 2020, dans une démarche qui écarte tout risque sanitaire de contamination des justiciables, en cette conjecture pandémique de la Covid-19. Ce procès par visioconférence a été consacré à des affaires d’extradition, dans un respect total des droits des personnes mises en cause, des droits de la défense et du contradictoire, en ayant bien évidement le consentement des concourants avec la présence d’interprètes et d’avocats pour assurer la défense. Toutefois, face aux circonstances de cette pandémie exceptionnelle, d’une ampleur inattendue, la continuité de l’activité judicaire impose d’autres mesures.
B. Moratoire et allègement des délais processuels
La justice et le temps sont deux concepts indissociables, notamment pour la justice pénale qui n’échappe pas à l’emprise des délais. Habituellement, le délai est le laps de temps au cours duquel un acte légal ou une procédure judiciaire doit être accompli. L’inobservation des délais fixés dans les conditions déterminées par les textes de lois ou les règlements administratifs, entraîne, s’il y a lieu, la déchéance du droit ou la réparation du ou des dommages.
Toutefois, l’interruption de l’activité de l’appareil judiciaire pour une durée inconnue, en fonction de l’évolution de la conjoncture pandémique et de la reconduction probable de l’état d’urgence sanitaire imposée par la pandémie de la Covid-19, entraîne des effets sur les délais obligatoires, en particulier les délais de recours, de prescription, de procédure prescrite à peine de caducité ou d’irrecevabilité… La suspension de ces délais est donc devenue une nécessité absolue pour une justice pénale équitable, sous peine de porter atteinte aux droits des assujettis.
Les autorités publiques ont pris conscience de cet enjeu. C’est la raison pour laquelle le cadre légal de l’état d’urgence sanitaire a intégré des dispositions relatives à l’aménagement des délais légaux et réglementaires. L’article 6 du décret-loi n° 2-20-292, du 24 mars, prévoit que le cours de tous les délais procéduraux, y compris les délais fiscaux, prévus par les textes législatifs et réglementaires en vigueur est suspendu. L’effet de cette disposition sera reconduit le lendemain de la levée de l’état d’urgence, en raison du caractère évolutif de la situation.
L’état d’urgence sanitaire a été proclamé au Maroc le 19 mars 2020, induisant de ce fait une équation judicaire assez complexe pour les délais échus avant le 24 mars, date d’entrée en vigueur de l’état d’urgence sanitaire, car les dispositions du décret-loi n° 2-20-292, n’indiquent pas la date de l’entrée en vigueur de l’état d’urgence sanitaire, autre que celle de son annonce par le ministre de l’Intérieur, le 19 mars 2020.
Les mesures de suspension ne peuvent pas être appliquées avant leur publication au Bulletin Officiel. Le gouvernement a anticipé en invitant l’ensemble des ordres des barreaux à déposer les procédures dont les délais devaient prendre fin avant le 24 mars, notamment les délais en lien avec les recours en cassation, les recours en appel… Par ailleurs, le deuxième alinéa a introduit une exception dans les délais de recours en appel des jugements pénaux rendus à l’encontre des prévenus poursuivis en état de détention, ainsi que les délais relatifs à la garde à vue et à la détention préventive.
Les autres modalités procédurales adaptées à la lutte contre la pandémie Covid-19, particulièrement celles qui impactent les mesures d’adaptation de la garde à vue, de la détention provisoire, de l’affectation des détenus, de l’application des peines ou encore des mineurs et des femmes violentées, ne manqueront pas de s’inviter parmi les jurisconsultes des débats juridiques ardus.
C. Aménagement des mesures de privation de liberté et d’exécution des peines
Dans cette situation de crise sanitaire hors normes à cause de la Covid-19, le fonctionnement de l’appareil judiciaire se déroule au ralenti mais il a permis une activité judiciaire qui assure le maximum de garanties pour préserver la sécurité sanitaire des justiciables ainsi que leurs droits. Le Maroc manque d’une législation propre aux mesures de privation de libertés et d’exécution des peines, exception faite de quelques décisions administratives à l’échelle des directions centrales des instances chargées de l’exécution de la procédure pénale.
La garde à vue est une mesure privative de liberté vis-à-vis de toute personne contre laquelle il existe des raisons plausibles de commission ou de tentative de commission de crime ou de délit. Cette mesure d’exception est décidée dans l’intérêt de l’enquête. Le droit d’être assisté par un avocat est un droit fondamental reconnu pour toute personne mise sous le régime de garde à vue, et reconnue par le système juridique marocain pour garantir un procès équitable. L’assistance d’un avocat est quelque peu limitée en droit marocain. Elle porte sur plusieurs actes judiciaires, parmi lesquels la possibilité de s’entretenir pour trente minutes avec son client. Il peut demander le cas échéant sa mise en liberté en contrepartie d’une caution pécuniaire ou personnelle.
Au regard des risques considérables de multiplication des contaminations dans les lieux enfermés d’une grande promiscuité et pour désengorger le milieu carcéral, le 5 avril 2020, le roi a gracié 5 654 détenus pour des libérations progressives. Dès l’annonce des premiers cas d’infection au Maroc et pour permettre la prévention et la lutte contre la propagation de la Covid-19, plusieurs mesures d’exception ont été prises par les instances de tutelle, par le ministère de la Justice et les établissements pénitentiaires, ainsi que par la délégation générale à l’administration pénitentiaire.
Dans un premier temps, les mesures anticipatives ont porté essentiellement, sur la prévention et la sensibilisation de la gravité de la situation sanitaire. Les établissements pénitentiaires ont été aussitôt dotés des équipements sanitaires et de protection nécessaires, en mobilisant le personnel pour veiller à l'application stricte des protocoles d’hygiène et pour mener des actions de sensibilisation des détenus quant à la gravité du virus et à la nécessité de s'en prévenir. A l’annonce de l’état d’urgence sanitaire, ces mesures sont devenues de plus en plus strictes au sein des établissements pénitentiaires.
Ayant conscience que l’entrée en vigueur des mesures générales de confinement a des conséquences sur la vie quotidienne des détenus, le dépistage est devenu systématique pour ces derniers. Des programmes d’accompagnement social, financier et en soutien psychologique, ont été mis en place pour le soutien de la population carcérale. Toutes les activités carcérales y compris le droit de visite ont été suspendues. Même les déplacements des détenus vers les différents tribunaux ont été suspendus en privilégiant la tenue des audiences à distance par visioconférence. Les fonctionnaires au sein de ces établissements ont été mis en quarantaine avec l'adoption d'un système de rotation pour le travail.
Les sorties des détenus pour des soins dans les hôpitaux ont été interdites, sauf dans les cas les plus urgents. La délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion a renforcé ses équipes médicales par la mise en place d’un système de consultations des médecins spécialistes en télémédecine28. Les activités de plein air ou en espace non confiné sont maintenues avec les aménagements nécessaires, et le droit de visite continue en limitant seulement le nombre des visiteurs aux parloirs, notamment pour les visites d’enfants et de personnes vulnérables, sous réserve d’une interdiction plus tard.
Au Maroc, la protection des mineurs délinquants a interpellé la présidence du ministère public qui a adressé une circulaire du 18 mars 2020 à ce propos pour suspendre tout internement des mineurs dans les établissements surveillés comme les maisons de rééducation, sauf dans les cas les plus graves. La présidence du ministère public recommande plutôt aux membres du parquet de remettre les mineurs à leurs familles à chaque fois que leur situation juridique et leur intérêt majeur le permettent, au lieu d’appliquer les mesures de l’article 471 du Code de procédure pénale29.
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La prolifération de la maladie Covid-19 a engendré une crise sanitaire inattendue et sans précédent, qui a abouti à un renversement complet du rythme de vie des citoyens et du fonctionnement des institutions constitutionnelles de l’État de droit. Les autorités publiques ont été invitées à faire face, dans l’urgence, à la force et à la dangerosité de la conjoncture sanitaire, pour assurer la sécurité de la santé publique et pour garantir le minimum vital au fonctionnement ralentir du service public. Afin d’adapter le rythme des institutions publiques au contexte conjoncturel et satisfaire un minimum de besoins d’ordre public, l’intervention du pouvoir exécutif a été marquée par l’adoption d’un ensemble de mesures d’urgence à caractère exceptionnel de lutte et d’anticipation, dans les divers domaines : social, économique, fiscal, bancaire, enseignement, judiciaire…
Ainsi, l’application d’un nouvel ordre juridique pour s’adapter à un nouvel ordre public et justifier les variations des mesures d’exception fut une nécessité impérative, d’autant que certaines de ces mesures d’exception restreignent les droits universels et libertés fondamentales des citoyens. Ce constat nous montre à quel point le droit n’est que le reflet des phénomènes et rapports sociaux. Il fournit une réponse à toutes les crises de circonstances inattendues de manière urgente, anticipative et incessante (L. Bergel, 2012, 124).
Dans ce contexte de basculement pandémique et de crise sanitaire, la production de la règle juridique n’a pas cessé de s’adapter et d’accompagner l’éparpillement des circonstances évolutives et exceptionnelles, ajoutées à l’état d’urgence sanitaire et aux aléas qui s’imposent. En effet, ce contexte d’urgence sanitaire constitue une opportunité pour le pouvoir exécutif et pour l’utilisation de la théorie des circonstances exceptionnelles, afin de justifier toutes les mesures d’intérêt général prises par les autorités publiques. En temps normal, elles seraient illégales, mais deviennent légales en de telles circonstances de crise sanitaire au nom de la sécurité publique et l’ordre public30.
Si les autorités publiques bénéficient de larges pouvoirs pendant la période de circonstances exceptionnelles, ces pouvoirs s’exercent sous le contrôle du juge administratif, dont les attributions et les pouvoirs ont été renforcés par la jurisprudence pour exercer un contrôle très étroit qui porte à la fois sur l’existence des circonstances exceptionnelles et sur leurs effets31. D’ailleurs, ces mesures prises lors des circonstances exceptionnelles, dont les effets sont de portée générale, ne doivent pas paralyser et mettre en quarantaine le fonctionnement de l’État de droit, seul garant des droits et libertés individuelles (Laubadère, 1992, 580). Il doit s’agir de mesures préventives et anticipatives, correspondant à une légalité d’exception, adaptées et proportionnées aux impératifs de la crise sanitaire, et limitées à la durée des circonstances de cette crise.
Bibliographie
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1 Le préambule de la Constitution de 1946 de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit « la santé » comme étant : « … un état de complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Le préambule déclare en outre que : « La possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale ».
2 L’article 25 de la déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 évoque également la santé comme partie intégrante du droit à un niveau de vie suffisant. Par ailleurs, le droit à la santé a été reconnu comme un droit de l’homme par le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966. Depuis, les autres traités internationaux relatifs aux droits de l’homme ont reconnu ou, du moins, évoqué le droit à la santé comme un droit fondamental de l’être humain.
3 Dahir n° 1-11-91 du 29 juillet 2011, Bulletin officiel n° 5964 bis, le 29 juillet 2011.
4 Bulletin officiel n° 6867, 24 mars 2020, p. 1782.
5 À l’exception des délais de recours en appel des jugements rendus contre les prévenus en état de détention et le décompte des durées de la détention provisoire et des gardes à vue.
6 L’article 21 de la Constitution marocaine du 1er juillet, énonce que « Tous ont droit à la sécurité de leur personne, de leurs proches et de leurs biens. Les pouvoirs publics assurent la sécurité des populations et du territoire national dans le respect des libertés et droits fondamentaux garantis à tous ».
7 L’article 24 de la Constitution marocaine du 1er juillet 2011, énonce que : « … Est garantie pour tous, la liberté de circuler et de s'établir sur le territoire national, d'en sortir et d'y retourner, conformément à la loi ».
8 L’article 81 de la Constitution marocaine du 1er juillet 2011, énonce que : « Le gouvernement peut prendre, dans l'intervalle des sessions, avec l'accord des commissions concernées des deux Chambres, des décrets-lois qui doivent être, au cours de la session ordinaire suivante du Parlement, soumis à ratification de celui-ci. Le projet de décret-loi est déposé sur le bureau de la Chambre des représentants. Il est examiné successivement par les commissions concernées des deux Chambres en vue de parvenir à une décision commune dans un délai de six jours. À défaut, la décision est prise par la commission concernée de la Chambre des représentants ».
9 Bulletin officiel n° 6867, du 24 mars 2020, p. 1782.
10 Ibid., p. 1783.
11 L’article 3 du décret-loi n° 2.20.293 instaurant l’état d’urgence sanitaire au Maroc, autorise les instances gouvernementales compétentes à prendre les mesures obligatoires pour : -interdire aux personnes de quitter leur lieu de résidence en dépit des précautions obligatoires ; -interdire aux personnes toute circulation en dehors de leur lieu de résidence, sauf cas de nécessité impérieuse ; -interdire tout rassemblement, attroupement ou réunion d’un ensemble de personnes ; -fermer les commerces et d’autres entités qui accueillent du public, et ce durant la période de l’état d’urgence sanitaire.
12 Caisse nationale de la sécurité sociale.
13 Confédération générale des entreprises marocaines.
14 D’autres mesures ont été prises en faveur des ménages du secteur informel : les chefs de ménages opérant dans le secteur informel pourront bénéficier des montants suivants, en fonction de la taille du ménage : -800 DH pour les ménages de deux personnes ou moins ; -1 000 DH pour les ménages composés de trois à quatre personnes ; -1 200 DH pour les ménages formés de plus de quatre personnes (communiqué du ministère de l’Economie et des Finances, le 9 avril 2020).
15 L’avis à tiers détenteur (ATD) est une procédure qui permet à l’administration fiscale de recouvrer une créance (un impôt ou une taxe) en sollicitant une autre personne que le débiteur, elle-même détentrice de la somme due (généralement la banque). L’avis à tiers détenteur peut être actionné en cas de non-paiement de l’impôt sur le revenu, de la taxe d’habitation, de la taxe foncière... L’ATD est toujours notifié aux deux personnes : le débiteur et le tiers détenteur de la somme. Il est possible de contester un avis à tiers détenteur avec une lettre recommandée avec accusé de réception auprès du trésor public dans les deux mois qui le suivent.
16 Bulletin officiel, n° 2853 du 5 juillet 1967.
17 L’article 6 du décret royal n° 554-65 dispose que : « Les infractions aux dispositions du présent décret royal et aux textes pris pour son application sont punies de l'emprisonnement de six jours à deux mois et d'une amende de 40 à 2 400 dirhams ou de l'une de ces peines seulement ».
18 L’article 308 du Code pénal marocain, dispose ce qui suit : « Quiconque, par des voies de fait, s'oppose à l'exécution de travaux ordonnés ou autorisés par l'autorité publique est puni d'un emprisonnement de deux à six mois et d'une amende qui ne peut excéder le quart des dommages-intérêts, ni être inférieure à 200 dirhams. Ceux qui, par attroupement, menaces ou violences, s'opposent à l'exécution de ces travaux sont punis d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et de l'amende prévue à l'alinéa précédent ».
19 L’article 300 du Code pénal, chapitre V sur les crimes et délits contre la sécurité publiques, section II sur la Rébellion, dispose que : « Toute attaque ou toute résistance pratiquée avec violence ou voies de fait envers les fonctionnaires ou les représentants de l'autorité publique agissant pour l'exécution des ordres ou ordonnances émanant de cette autorité, ou des lois, règlements, décisions judiciaires, mandats de justice, constitue la rébellion. Les menaces de violences sont assimilées aux violences elles-mêmes ».
20 L’article 4 alinéa 3 à 6 de l’ordonnance n° 2020-303, portant adaptation de règles de procédure pénale.
21 Communiqué, Présidence du ministère public, Rabat, 16 mars 2020.
22 Communiqué conjoint du ministère de la Justice, du Conseil supérieur de l’autorité judiciaire et de la présidence du ministère public, n° 1/151, 16 mars 2020.
23 Selon l’article 5 de l’ordonnance n° 2020-303, les juridictions pourront, sur décision présidentielle, statuer à juge unique en première instance et en appel.
24 Circulaire du ministère de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’administration, 1/2020 du 16 mars 1920 et 2/2020 du 1er avril 1920.
25 Les audiences peuvent se tenir en publicité restreinte, à huis clos, ou en chambre du conseil, à l’exception des journalistes qui pourront donc assister à certaines audiences...
26 Karima Chemsi, Audiences à distance. Les juridictions s’adaptent aux mesures sanitaires, leseco. https://leseco.ma/maroc/audiences-a-distance-les juridictions-sadaptent-aux mesures sanitaires.html, consulté le 15 janvier 2021. MAP, Maroc : plus de 5 000 détenus ont bénéficié de procès à distance.
https://www.lesiteinfo.com/maroc/maroc-plus-de-5000-detenus-ont- beneficie-de-proces-a-distance/, consulté le 13 mai 2020.
27 Il existe un grand flou sémantique autour des termes de visioconférence, de vidéoconférence, de visiophonie, de vidéocommunication et autour de leur orthographe (avec ou sans tiret), en raison notamment d’anglicismes.
L’équivalent du terme français « visioconférence » est celui de « vidoconference » ou « videoconferencing ». Les termes francophones les plus courants aujourd’hui : visioconférence (réunions, témoignages, audiences…) et visiophonie (terme plus général) (DUMOULIN et LICOPPE, 2009).
28 Communiqué de presse de la délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion, le 24 avril 2020.
29 « Le juge des mineurs peut prendre des mesures relatives à la garde du mineur, aux termes des dispositions de l’article 471 du Code de procédure pénale, il peut en effet par ordonnance confier le mineur : -à ses parents, à son tuteur, à son tuteur datif, à la personne qui le prend en chargée ou qui est chargée de sa garde, ou à une personne digne de confiance ; -à un centre d’observation ; -à la section d’accueil d’une institution publique ou privée habilitée à cet effet ; -au service public ou établissement public chargé de l’assistance à l’enfance ou à un établissement hospitalier, notamment au cas de nécessité d’opérer une cure de désintoxication ; -à un établissement ou à une institution de formation professionnelle ou de soins, relevant de l’État ou d’une administration publique habilitée à cet effet, ou à un établissement privé agrée ; -à une association d’utilité publique habilitée à cet effet. S’il estime que l’état physique, psychique ou le comportement du mineur justifie une observation approfondie, le juge peut ordonner son placement provisoire dans un centre d’observation agréé pour une durée ne dépassant pas trois mois. Ces mesures peuvent, le cas échéant, être exercées sous le régime de la liberté surveillée… ».
30 Ayant un sens d’interprétation large, le juge des référés du Tribunal administratif de Casablanca avait autorisé un ressortissant libyen en transit vers la Tunisie à accéder au territoire marocain en dépit de la fermeture des frontières (T. adm. de Casablanca, ordonnance du juge des référés n° 239 du 23 mars 2020, dossier n° 358/7101/2020). Une décision qui a été cassée par la Cour d’appel administrative de Rabat, en considérant que la fermeture des frontières du Royaume est un acte de souveraineté par excellence, dont les effets juridiques ne peuvent être suspendus ou les dispositions négligées que dans les cas décidés par la décision d’interdiction elle-même ou par des actes ultérieurs pris par la même autorité compétente (C. App. Adm. Rabat, Arrêt n° 210 du 26 mars 2020, Dossier n° 422/7202/2020).
31 Le juge des référés du Tribunal administratif de Toulouse, a affirmé l’illégalité de la note du directeur de l’administration pénitentiaire du 6 avril 2020, pour atteinte aux droits de la défense et entrave au droit du détenu à l’assistance d’un avocat de son choix. En effet, cette note exigeait des avocats de produire une attestation sur l’honneur, écrite ou orale, qu’ils ne présentent pas l’un des symptômes du Covid -19 qu’ils n’ont pas été en contact avec une personne symptomatique.